Didier Le Reste : Il faut empêcher Nicolas Sarkozy de continuer à nuire au monde du travail.
Est-ce que le résultat du premier tour de l’élection présidentielle reflète le climat de lutte que l’on peut observer au sein de nombreuses entreprises ?
DLR. L’analyse des résultats méritera d’être plus approfondie. Mais, évidemment, le score du Front National interpelle. Selon moi, il résulte avant tout de l’insécurité sociale générée par la crise qui traverse le pays et l’Europe.
Les grandes luttes médiatisées, qui révèlent la casse industrielle et les dégâts causés dans tous les secteurs par les restructurations et les délocalisations, ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Le mal est beaucoup plus profond et diffus.
Les conséquences sur la vie des populations, sur les économies des territoires sont réelles, mais insuffisamment mises au grand jour. Et dans ce contexte, il y a lieu de se féliciter de l’émergence d’une nouvelle force politique à gauche, incarnée par l’alliance au sein du Front de Gauche.
Son évolution se poursuit d’élection en élection et cela ne peut que croître.
Ce score peut peser dans les semaines et les mois à venir ?
DLR. Nous avons une responsabilité. Nous avons levé l’espoir, réintéressé les gens à la politique. Face aux masses de gens qui ont permis la réussite des meetings et des multitudes d’assemblées citoyennes, il est inconcevable de fermer d’emblée la porte à toute possibilité d’intervenir directement dans les choix politiques.
La situation doit être analysée au jour le jour. Selon moi il faut peser au maximum pour que la gauche réussisse et rapidement !
Justement, quelles décisions devraient être prises rapidement en cas de victoire de François Hollande le 6 mai ?
DLR. Toutes les enquêtes le disent. Ce qui a porté le Front de Gauche à un tel score, ce sont d’abord les priorités données à la relance de l’emploi d’un point de vue quantitatif et qualitatif, mais aussi à la revalorisation des qualifications.
Mais on ne peut pas recréer de l’emploi si on ne met pas au préalable du carburant dans la machine pour relancer la consommation et par cela la production.
Ainsi il faut que le prochain gouvernement, par décret, avant même les législatives, redonne du pouvoir d’achat- notamment par la revalorisation des salaires via une revalorisation du Smic- et des retraites.
C’est la clé pour faire entrer davantage de recettes fiscales dans les caisses de l’Etat et des cotisations supplémentaires dans les caisses des systèmes sociaux.
La bataille pour la réindustrialisation reste donc de pleine actualité ?
DLR. En menant effectivement la bataille, le Front de Gauche est dans la vérité. Comme l’était le Parti communiste déjà dans les années 1980, tandis que l’on cassait les mines, la sidérurgie, la navale et même, déjà, l’industrie automobile.
Je me souviens d’un Henri Krasucki prédisant que si ces politiques se poursuivaient, la France ne serait plus que le « bronze-cul de l’Europe » !
Mais, en trente ans, la France a cassé trois millions d’emplois industriels. Les 500 000 emplois de services créés sur cette période n’ont pas la même plus-value. Mais aujourd’hui, le Parti communiste n’est plus seul à porter la question de la nécessaire réindustrialisation.
Cela aussi nourrit l’espoir. Parmi les urgences auxquelles un futur gouvernement de gauche devra faire face, il y a aussi la nécessité d’abroger un certain nombre de lois régressives mises en place par Nicolas Sarkozy, telle celle de la contre-réforme des retraites de 2010 ou celle sur la révision générale des politiques publiques.
Pour toutes ces raisons et bien d’autres, le pays a besoin d’une gauche authentique, courageuse, capable de prendre des décisions à l’heure où toute l’Europe qui lutte contre Sarkozy et Merkel nous regarde.
Comment le syndicaliste que vous êtes accueille les attaques répétées de l’UMP contre les syndicats ?
DLR. Leur férocité ne me surprend pas. Pendant la campagne de 2007, j’étais en responsabilité nationale à la fédération des Cheminots CGT, nous étions sans cesse invectivés à la télévision par Sarkozy et Copé.
Et parmi les premières réformes qu’il a faites, une fois élu, il y a eu le service minimum dans les transports et les atteintes aux régimes spéciaux de retraite des cheminots.
C’est pourquoi aujourd’hui, vu le niveau des attaques et de ce qu’elles augurent, il faut le battre à plate couture pour l’empêcher de nuire encore, en utilisant le bulletin François Hollande et en créant un rapport de forces à la hauteur de ces attaques.
Propos recueillis par Laurence Mauriaucourt
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