lu sur Dialogue clichois :
Austérité, croissance : illusions et ambiguïtés de F. Hollande
Renforcer le Front de gauche, force constructive de propositions, aux élections législatives contribuera à aider Hollande et le nouveau gouvernement à sortir des ambiguïtés et à lever un certains nombre de contradictions qui, si elles perduraient, seraient préjudiciable à la réussite du changement.
F. Hollande a été, en parole, très critique sur la « capitulation » de Sarkozy face à Merkel à propos du projet de traité adopté par le sommet européen de décembre dernier. Il s’est engagé à « renégocier ».
Le nouveau président dit ne pas seulement vouloir une « croissance européenne », mais, et c’est l’impact de la campagne du Front de gauche qui l’y a poussé, il déclare que "l’austérité ne peut pas être une fatalité ».
C’est exact. Mais alors pourquoi s’entête-t-il toujours à vouloir infliger la purge prévue par la règle d’or en se disant « prêt à ce que la France réalise, en 2013, un déficit public qui n’ excéderait pas 3% du PIB et inscrit dans une trajectoire le ramenant à 0% en 2017 » ?
Atteindre cet objectif supposerait de continuer la casse des services publics et de la protection sociale.
Hollande cultive une illusion : celle qui consiste à prétendre que l’on peut faire de la croissance au niveau de l’ensemble de la zone euro, tout en continuant de mettre en œuvre dans chaque pays pris isolément les orientations du pacte européen de stabilité financière.
F. Hollande déclare qu’il œuvrerait pour la "réorientation de l’Europe pour l’emploi, pour la croissance, pour l’avenir".
Prenant la mesure de l’impact dans le mouvement social des idées avancées par le PCF, il se prononce à son tour pour une réorientation du le rôle de la Banque centrale européenne privilégiant la croissance et l’emploi.
Le nouveau président devient sensible à l’argumentation des économistes du Front de gauche en dénonçant à propos de la BCE, des mécanismes qui font que les banques se font prêter 1000 milliards d’euros par la BCE à 1% de taux d’intérêt, pour, ensuite, les re-prêter, éventuellement, aux États à des taux de 3 à 7%, tandis que les États, eux, ne peuvent bénéficier d’aucun appui de la BCE.
En fait, cette situation aberrante découle des termes-mêmes du traité de Maastricht dont Hollande et le PS ont été les chauds partisans.
JM Ayrault, le soir des élections a finit lui aussi par admettre à la TV que la BCE devrait prendre modèle sur la Réserve fédérale des États-Unis qui achète directement des titres de la dette publique américaine.
Hollande vise une simple « re-négociation » du traité qui ne viserait pas à mettre en cause le contenu actuel du projet de traité, mais chercherait à le « compléter » par un volet sur la « croissance »... Mais pour mater les marchés financiers et sortir de la cris suffit-il de « compléter le Traité », d’y ajouter un volet croissance ?
Une nouvelle négociation apparaît incontournable et cela fait durcir le ton de l’Allemagne, de la commission européenne et de la BCE qui ne veulent pas toucher à la BCE et refusent que soit levées les politiques d’austérité, ne parlant de politique de croissance que dans la mesure ou cela marche de paire avec plus de « compétitivité », de « flexibilité » et de réduction des dépenses publiques.
Suffit il de réinjecter de l’argent, de réalimenter les banques sans changer leur logique, leur gestion, leur critères d’attribution ? Sans les contraindre à diriger le crédit, la création monétaire non vers la relance des activités spéculatives mais vers ce qui est utile : le financement de l’emploi et de la formation, l’essor des services publics, l’investissement ?
Les 1000 milliards d’euros injectés dans les banques européennes par la BCE n’ont pas servi à déverrouiller le crédit : les nouveaux crédits aux entreprises en Europe ont diminué de prés de 14 milliards d’euros entre janvier et mars. Et le niveau des crédits nouveaux aux ménages a baissé de 5 milliards d’euros sur la même période. Or, dans le même temps, les dépôts des établissements bancaire à la BCE ont quasiment doublé de 413 à 801 milliards d’euros depuis le 1er janvier dernier !
F. Hollande propose la création d’un système d’eurobonds, cela consisterait à mutualiser davantage au niveau européen les emprunts en espérant des prêts à taux moins élevés. Mais ces emprunts seraient levés sur les marchés financiers, ce qui laisse de beaux jours aux requins de la spéculation sur le dos des peuples. Le système resterait en place, intouché et la crise perdurerait.
Il faut lever l’illusion qu’une nouvelle croissance réelle européenne durable puisse se faire financer à partir d’emprunts sur les marchés financiers.
Cela reviendrait à accentuer la tutelle des marchés financiers et les exigences de rentabilité financière contre l’emploi et la croissance réelle, alors que, pour réussir, des projets communs européens devraient être articulés à des objectifs chiffrés et concertés de créations d’emplois "décents" et de mises en formation pour de futurs emplois. Idem, si l’on veut tenir sur une ambition écologique et de transition énergétique. En réalité, la France et l’Europe n’échapperont pas à la nécessité de se confronter avec les marchés financiers, sans accepter le scénario noir d’un repli du chacun pour soi en Europe qui exacerberait les mises en concurrence, avec un éclatement de la zone euro, une relance de la spéculation, des difficultés immédiatement accrues pour les peuples, l’enfoncement des économies les plus faibles et tous les risques d’affrontement.
Les économistes communistes, au sein du Front de gauche, proposent une sortie de la crise par le haut visant l’expansion sociale et écologique, avec en son cœur l’emploi, les services publics et la sécurisation de tous les moments de la vie de chacun-e au lieu du chômage et de la précarité.
Outre une taxation des transactions financières, une séparation des banques de dépôt de leurs activités spéculatives, il faut surtout au plus vite :
- Un pôle public bancaire et financier pour pratiquer un tout autre crédit aux investissements favorisant l’emploi, les salaires, la formation, le développement social et écologique et non à ceux accompagnant les délocalisations, la spéculation
- Une politique salariale favorisant l’élévation des salaires et la protection sociale, refusant les exonérations de cotisations sociales, et impulsant une baisse régulière du temps de travail pour sortir de la course au productivisme
- Une implication massive de la BCE pour racheter les dettes publiques et une réorientation de sa politique en faveur d’une sélectivité du refinancement des banques qui prêtent aux entreprises
- L’ouverture du débat en Europe avec les gouvernants, les peuples, les forces politiques progressistes, les forces sociales et syndicales, pour la réorientation immédiate de la BCE et de sa création monétaire en faveur des services publics, d’une protection sociale universelle, avec un Fonds européen de développement social et écologique, et pour une nouvelle sélectivité du refinancement du crédit bancaire aux entreprises.
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