Elections professionnelles : Des dizaines de milliers d'enseignants privés de vote ?
A quelques heures de la clôture du scrutin (jeudi, 17 heures), le
taux de participation dans l’éducation nationale s’annonce historiquement
faible. Furieux, les syndicats accusent le ministère d’avoir bâclé
l’organisation de ces élections, pour la première sous forme
électronique.
Les syndicats de l’éducation avaient raison de s’inquiéter. Le taux de
participation aux élections professionnelles, organisées entre le 13 et le 20
octobre, pour la première fois sous forme de vote électronique, s’annonce
beaucoup plus faible que d’habitude. Hier matin, à la veille de la clôture du
scrutin (jeudi, 17 heures), seuls 30% des enseignants s’étaient déplacés pour
élire leurs représentants dans les comités techniques (CT) et les commissions
administratives paritaires (CAP). Il y a trois ans, lors des dernières
élections, ils étaient plus de 60%.
Une désaffection qui s’explique, selon les syndicats, par les nouvelles
modalités de vote imposées par le ministère qui porte-là une « lourde
responsabilité ». « On a multiplié les entraves et tout fait pour
éloigner les enseignants de ce scrutin qui a été bâclé », accuse Sébastien
Sihr, secrétaire général du SNUipp-FSU, principal syndicat du primaire.
Listes électorales incomplètes, notices de vote perdues dans la nature,
connexions impossibles au serveur du ministère... Parmi le million d'agents de
l’éducation nationale, dont 860 000 enseignants, plusieurs dizaines de milliers
ont été exclus du scrutin, assurent les syndicats. Que ce soit à cause d’un
dysfonctionnement administratif ou de la complexité de la procédure.
« Beaucoup de personnels ne sont pas dans des conditions normales de
vote, estime Patrick Désiré, secrétaire général de la CGT Educ'Action.
Par exemple, des agents de laboratoire des académies de Nice et de La
Réunion ne sont pas sur les listes électorales. »
Le choix du ministère de raccourcir la durée du scrutin - une semaine contre
trois auparavant – et de l’organiser dans la foulée de la rentrée et non plus en
décembre, n’a pas arrangé les choses. De fait, l’administration n’a pas eu le
temps de se retourner et les personnels de s’informer correctement. « Le
caractère collectif du scrutin s'est perdu, souligne Sébastien Sihr.
Auparavant, il se déroulait dans l’école, sur une journée pour ceux qui ne
votaient pas par correspondance, ce qui suscitait une émulation, une
effervescence. »
Pour beaucoup, tout cela ne doit rien au hasard. Et relève clairement de la
manœuvre politique. « Il y a une volonté d’affaiblir les syndicats et la
parole des enseignants à un moment où ils sont très critiques envers le
gouvernement », poursuit Sébastien Sihr, qui redoute déjà
« l'interprétation politique » qui pourrait être faite de ce faible
taux de participation par le ministère.
Les syndicats ne comptent pas en rester là. Dans un courrier aux ministres
Luc Chatel et Laurent Wauquiez, Patrick Gonthier, de la fédération Unsa
Education, « se réserve le droit d'intervenir (...) auprès des juridictions
compétentes ». Même tonalité au Snes-FSU. « Lorsque les modalités
d’organisation conduisent à perdre un votant sur deux, cela pose un problème
politique et juridique », insiste Daniel Robin, co-secrétaire général du
syndicat, qui « n’exclu rien », y compris une action devant
les tribunaux.
Le SNUipp-FSU devrait également écrire à Luc Chatel pour lui demander, face à
cette situation, d’étendre de deux semaines la période de vote. « Le
ministère aime parler de ‘’morale’’, ‘’d’éducation civique’’ et se montre
incapable d’organiser correctement ce grand moment démocratique que sont les
élections professionnelles », peste Sébastien Sihr.
Lire aussiLa pénurie de profs des écoles se confirme Chatel
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire