" Des communes en commun", l'éditorial de Patrick Apel-Muller
Le pacte de responsabilité est d’ores et déjà à l’origine d’une dépression. Politique, celle-là. Les électeurs, de gauche particulièrement, sont peu motivés et se disent guère décidés à voter. L’hymne aux thèses patronales entonné par François Hollande trouble les contours.
Même François Chérèque a trouvé hier que le président avait « dérapé » en faisant une priorité de la traque des abus à la Sécurité sociale – tout juste évalués à 60 millions d’euros – tandis qu’il ne disait mot des fraudes sociales des entreprises ou des 5 milliards d’euros de droits au minimum de ressources qui ne sont pas réclamés par les ayants droit. Il n’est pas certain que les dernières déclarations des cercles dirigeants socialistes soient de nature à rassurer la gauche. Jean-Marc Ayrault a jugé hier que 50 milliards de réduction des investissements et dépenses publics, c’était un « minimum ». Tous aux abris ! Les dévastations seraient immenses pour les services publics et les droits sociaux. Quant à Harlem Désir, il a défini la formation qu’il dirige comme « le parti de ceux qui entreprennent », proclamant l’union sacrée des exploiteurs et des exploités dans la « guerre économique ». Il baptise cette grande illusion « pacte patriotique ». Jaurès, réveille-toi, qui rappelait : « Les privilégiés égoïstes veulent jeter sur leurs privilèges le manteau pourpre de la guerre et de la patrie ! »
Pourtant, il serait bien risqué de baisser les bras, de se résigner au mauvais sort auquel l’austérité nous destine, de courber l’échine sous le fardeau des rengaines assénées sur « le-coût-du-travail-qui-mine-la-compétitivité-des-entreprises ». Le premier rendez-vous électoral de 2014 concerne les communes, un lieu dont la gauche – et singulièrement les communistes – a fait un bouclier social, un moteur de services publics, un lieu où germent parfois des formes renouvelées de démocratie. Ici, un maire communiste normand ose prêter de l’argent à une usine pour qu’elle évite la fermeture ; là un maire de gauche finance le permis de conduire pour des jeunes comme un atout afin de trouver de l’emploi ; ailleurs, des lieux de rencontres donnent du sens au fait de vivre ensemble. Dans les années qui viennent, l’obsession de la réduction des déficits budgétaires risque de priver de ressources des institutions de proximité souvent vitales pour les familles populaires. Il est donc urgent de les défendre, de s’en emparer pour les démocratiser, en faire des lieux d’innovation sociale, de construction – de logements sociaux par exemple –, des ferments de citoyenneté, des lieux qui impulsent des pratiques culturelles accessibles à tous. Bref des lieux qui s’émancipent de l’ordre libéral.
Les communes sont un objet de convoitise pour des forces politiques qui parient sur l’abstention. L’extrême droite tente de faire main basse sur des villes pour y imposer son ordre. La droite espère y trouver une revanche et y dessiner les contours d’un ultralibéralisme sans frein. Le Parti socialiste veut sauvegarder ses positions, souvent écartelé entre des postures nationales et des pratiques locales bien différentes. Le Front de gauche s’attache à en faire des points de résistance aux politiques d’austérité et des territoires de solidarité, en s’appuyant sur les besoins populaires. Hier, le PCF a proclamé « un esprit de conquête maximum ». En cette fin janvier, la campagne est lancée.
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