François Hollande, The Guardian, et le traité Sarkozy-Merkel (la chronique de Sébastien Crépel)
Après les rectificatifs de François Hollande qui ont suivi sa phrase au quotidien britannique The Guardian, cette semaine (« il n’y a plus de communistes en France, ou pas beaucoup »), tout serait, paraît-il, rentré dans l’ordre.
Martine Aubry a réaffirmé, après le candidat du PS, son respect vis-à-vis du Front de gauche et du PCF, sujet sur lequel il n’y a guère de matière à polémique. Une parenthèse si bien close que le Journal du Dimanche n’hésitait pas, hier, à mettre la charrue avant les bœufs en spéculant sur l’entrée future de « ministres communistes au gouvernement » ! Or, si « l’incident est clos », selon Jean-Luc Mélenchon, sur le chapitre de savoir s’il demeure ou non des, communistes en France, le débat sur la conduite que la gauche doit adopter face aux marchés, en revanche, est toujours ouvert. Car sur ce point, le candidat PS n’a ni corrigé ni démenti les propos que lui prêt le quotidien britannique.
Qu’a dit exactement François Hollande ? Il a expliqué que la City, place financière de Londres, n’avait rien à craindre de l’arrivée de la gauche au pouvoir en France, car celle-ci a, durant des années où elle a été au gouvernement, »libéralisé les marchés et ouvert les marchés à la finance et aux privatisations ». Certes, pour être tout à fait juste, on doit dire que François Hollande ne se fait pas l’apologiste de la dérégulation financière, puisque, s’il fait crédit aux premières années du gouvernement de Tony Blair d’avoir su, »après une longue période de thachtchérisme, rétablir l’éducation, la santé, et le service public », il déplore que le premier ministre travailliste ait ensuite « succombé à l’idée dominante selon laquelle les marchés pourraient se réguler eux mêmes et à la notion qui veut que les marchés et le libéralisme seraient en eux-mêmes facteurs de croissance…Nous en avons vu les conséquences ». Mais François Hollande n’en reste pas moins le partisan d’une régulation timide de la finance, dont il veut assurer la protection des intérêts, et entend le faire savoir à Londres, explique The Guardian. Or, c’est bien dans cette optique politique de rassurer les marchés en non par plaisir de froisser les communistes, que François Hollande a déclaré qu’il n’y a plus de communistes en France ou pas beaucoup », les craintes concevables quand « Mitterrand avait nommé des ministres communistes au gouvernement » en 1981 n'étant plus fondées, selon lui.
Plus grave, toujours selon ses propos rapportés dans le même article, le candidat PS ne demanderait plus de « négociation totale » du traité Sarkozy-Merkel, mais simplement de lui « adjoindre une clause au sujet de la croissance économique » Pis François Hollande souhaiterait même, s’il est élu faire « ratifier le traité par le Parlement français après l’élection », et « ne le soumettrait pas au référendum ».
Comment ne pas faire le lien entre ces déclarations et les débats qui traversent le PS sur le vote, demain, à l’assemblée nationale, de la mise en place du mécanisme européen de stabilité (MES), ce fonds de secours prêtant aux États en difficulté en contrepartie de l’acceptation par ces derniers du renforcement de l’austérité prescrite par le futur traité Sarkozy-Merkel ? Lors de son bureau national, réuni mardi dernier, le PS a penché pour l’abstention sur ce texte. Explication, par Martine Aubry, dans le Parisien d’hier : les socialistes sont favorables au MES comme fonds de secours, mais hostiles au traité de Merkel et Sarkozy, « qui font de l’austérité l’alpha et l’oméga
de toute politique ». On notera comme un point positif le fait que la première secrétaire du PS, qui s’était prononcée pour le « oui » au traité constitutionnel européen en 2005, se dise aujourd’hui opposée à ce nouveau traité, tout comme l’ex-strauss-khanien Jean-Christophe Cambadélis. Mais
alors, il faut aller au bout de la logique. Et voter contre, demain, le projet de loi qui conditionne explicitement le MES à la ratification du traité Sarkozy-Merkel.
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