"C dans l'air" du 13 décembre sur le communisme : Pierre Laurent écrit à Yves Calvi
Mardi 13 décembre, France 5 diffusait un « C dans l'air » dont le thème était
« le communisme 20 ans après ». Yves Calvi recevait à cette occasion, Stéphane Courtois et Alexandre Adler sur le plateau.Suite aux propos scandaleux tenus par certains sur le plateau, vous trouverez ci-dessous le courrier de Pierre Laurent, Secrétaire national du PCF, envoyé ce jour à Yves Calvi.
"Depuis maintenant des mois, la discrimination à l’égard du Parti communiste français dans les émissions politiques dont vous avez la charge, et plus globalement dans celles du groupe France Télévisions, est une constante. Toutes nos demandes pour qu’il y soit mis un terme sont - plus ou moins poliment - mais systématiquement écartées.
Mais cette fois, trop c’est trop. Le mardi 13 décembre, l’émission « C’est
dans l’air » avait pour invité Stéphane Courtois, dont la seule fonction
historique reconnue est l’anticommunisme professionnel. C’est votre choix
éditorial, je n’ai pas à le contester. Toutefois, au cours de cette émission,
cet invité, qui ne m’a jamais rencontré de sa vie, s’est livré à une violente
attaque personnelle en déclarant je cite « Pierre Laurent (…) un fils
d'apparatchik qui a mit les pieds dans les chaussons de son papa et qui prend la
direction du parti, quelque part ça fait presque pitié».
Cette pitoyable déclaration est restée sans réponse. Insultante et
diffamatoire, elle ne mériterait de ma part que le mépris. Elle s’inscrit dans
le registre des poncifs anticommunistes dont Monsieur Stéphane Courtois s’est
fait une spécialité, en lieu et place de celle d’historien dont il s’affuble à
propos du Parti communiste français.
Je ne peux me taire car cette déclaration intervient alors que la
discrimination à notre égard est un scandale qui n’a que trop duré. Élu
secrétaire national du PCF en juin 2010, je n’ai été invité à aucune émission
politique importante dont vous avez la responsabilité, et quasiment aucune sur
l’ensemble des antennes de France Télévisions. Ce boycott est en contradiction
avec toutes les règles déontologiques en matière de pluralisme du débat d’idées,
et avec toutes les règles du CSA qui invitent à respecter l’ «équité» des temps
de parole des formations politiques, singulièrement celles qui disposent d’une
représentation politique parlementaire.
Cette situation devient plus insupportable encore depuis que nous sommes
entrés, de fait, dans la campagne présidentielle. Le Front de gauche, dont le
Parti communiste français est totalement partie prenante, et son candidat
Jean-Luc Mélenchon dont je préside le conseil national de campagne, y jouent un
rôle de premier plan. Pourtant, la discrimination perdure. Elle devient même
chaque jour plus flagrante au fur et à mesure que des candidats, subitement
touchés du jour au lendemain par la grâce sondagière, occupent aussitôt le
hit-parade des apparitions médiatiques.
L’argument selon lequel je ne suis moi-même pas candidat ne résiste
pas une seconde à l’examen. Un, notre campagne et notre candidat sont loin de
bénéficier de l’égalité de traitement qu’ils méritent. Le respect des règles du
CSA nécessite bel et bien l’augmentation globale du temps de parole du Front de
gauche, donc tout à la fois celle de Jean-Luc Mélenchon et celles d’autres
représentants nationaux du Front de gauche. Deux, le rôle politique et
parlementaire joué par le Parti communiste dans cette campagne ne peut échapper
qu’à ceux qui cherchent à nier la réalité.
Trois, ceux qui avancent cet argument à mon égard devront m’expliquer
pourquoi ils ne s’appliquent ni au secrétaire général de l’UMP Jean-François
Copé, ni à la première secrétaire du PS Martine Aubry, ni à la première
responsable d’Europe Ecologie Les Verts, Cécile Duflot, sans parler des dizaines
de responsables d’autres formations politiques qui sont des invités permanents
de vos émissions, sans que jamais un seul responsable communiste ne puisse y
trouver place.
Ainsi, pour ne prendre qu’un exemple récent sur lequel nous vous avons alerté
avant l’émission, comment se fait-il qu’aucun parlementaire ou aucun maire de
notre parti, très actif sur le droit de vote des étrangers depuis trois
décennies, ne trouve place le lundi 12 décembre sur le plateau de « Mots croisés
» quand Rama Yade, qui n’a plus aucun rôle politique, et l’improbable Arno
Klarsfeld, sur ce sujet auquel il ne s’est jamais intéressé, y figurent en bonne
place ?
Et pour n’en prendre qu’un seul autre un peu plus ancien, puisque l’histoire
du PCF semble vous intéresser quand il s’agit d’inviter Stéphane Courtois,
comment expliquer que le discours que j’ai prononcé devant plus de sept mille
personnes le 23 octobre dernier dans la carrière de Châteaubriant aux côtés du
secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, en hommage aux 27 résistants
fusillés il y a soixante ans par les nazis, ait été totalement ignoré ? La
mémoire de Guy Môquet et de ses camarades n’intéresse-t-elle que quand elle est
instrumentalisée par un président de la République qui en trahit chaque jour les
idéaux ?
Aussi, je vous demande d'agir pour mettre un terme à cette mise à l’écart du
PCF et de moi-même comme secrétaire national de ce parti dans vos émissions.
Ainsi, sera défaite cette anomalie anti-démocratique qui, j’en suis sûr, suscite
la réprobation de très nombreux journalistes de vos propres rédactions, que je
sais attachés aux valeurs du pluralisme.
Si les propos insultants de Stéphane Courtois sur votre antenne ont été, vous
l’aurez compris, la goutte d’eau qui fait déborder le vase, vous comprendrez que
ma requête, au-delà de ce lamentable incident, est plus large. Elle n’a qu’un
seul but : faire droit au respect du pluralisme sans lequel la démocratie n’est
qu’une coquille vide".
Pierre Laurent, Secrétaire national du PCF
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