À un peu plus d’un mois des élections cantonales, il n’est pas inutile de revenir sur les raisons qui conduisent, nombre de départements à se trouver au bord de la faillite, ainsi que sur les réponses à y apporter. La politique du gouvernement Sarkozy et sa réforme des collectivités qui vise à éloigner un peu plus les citoyens des lieux de pouvoir intervient, en fait, comme l’épilogue d’un processus engagé depuis une vingtaine d’années. Tous les gouvernements qui se sont succédé ont eu une seule obsession : Comment faire sauter tous les verrous, toutes les résistances à la politique d’intégration européenne ? Comment faire des collectivités locales des relais, les plus performants possibles, d’une politique de régression ? Comment rentabiliser la manne financière que constituent leurs dépenses ? Du traité de Maastricht, en passant par celui de Nice et celui de Lisbonne, nous retrouvons une même logique : la guerre économique, la concurrence entre les hommes et les territoires, la financiarisation de toute l’économie vers toujours plus de rentabilité au détriment des dépenses de salaires, de formation, de recherche, au détriment des services publics et des dépenses sociales.
En 2000, une commission présidée par Pierre Mauroy est chargée de préparer l’acte II de la décentralisation. Il est fait état d’une clarification des compétences, du transfert du RMI aux départements. L’avenir de ces derniers y est décrit comme dépendant du développement de l'intercommunalité. Mais le fait le plus marquant aura été l’affirmation dans le cadre de l’Europe, de régions plus grandes et plus fortes. C’est dans ces conditions que Raffarin pourra, en 2003, faire voter une réforme qui est à l’origine de l’asphyxie financière que connaissent aujourd'hui un nombre grandissant de départements. Le RMI, les routes nationales, les personnels TOS des collèges (techniciens et ouvriers spécialisés) sont transférés aux départements. Mais, le projet Raffarin, « la mère de toutes les réformes », comme il se plaisait à le dire, était bien autre chose qu’un acte II de la décentralisation. Avec le vote d’une loi constitutionnelle, il s’agissait d’une réforme aussi importante que celle de 1958 et qui allait bouleverser la vie quotidienne des Français avec les conséquences dont nous mesurons les dégâts aujourd'hui.
Nous étions face à un enjeu de civilisation, mais, à part les communistes, tous les élus se sont placés sur le même terrain que le gouvernement pour réclamer davantage de compétences. Rappelons que cette réforme constitutionnelle a été votée à l’unanimité du parlement, réuni en congrès le 28 mars 2003, à l’exception des députés et sénateurs communistes. Dans ces conditions, il était plus aisé pour Sarkozy, de préparer sur la base du rapport Balladur, son projet de casse des collectivités territoriales. La situation de quasi faillite dans laquelle se trouvent, selon les estimations, un tiers des départements était contenue en germe dans le vote de la réforme constitutionnelle de mars 2003. Avec le transfert de pans entiers de grandes missions de politiques nationales vers les départements et les régions, toutes les inégalités sociales et territoriales se sont aggravées.
Avec la crise, les départements sont confrontés à une hausse sans précédent de leurs dépenses sociales (Revenu de solidarité active, allocation personnalisée à l’autonomie, prestation compensatoire du handicap). Il convient bien entendu d’exiger de l’État qu'il compense « à l’euro » près ces transferts. Mais le moment n’est-il pas venu de demander à l’État qu'il reprenne au nom de la solidarité nationale le versement des allocations aux bénéficiaires du RSA ? De la même manière, alors que le débat sur la dépendance est à l’ordre du jour, le financement de l’APA par les départements doit-il être pérennisé ? Dès sa création, le 1er janvier 2002, les conseillers généraux communistes de notre département se sont appuyés sur cette avancée pour faire reconnaître la dépendance des personnes âgées, qui ont cotisé toute leur vie, comme 5ème risque dont la prise en charge serait assurée par la sécurité sociale. L’actualité de cette proposition ne prend elle pas tout son sens aujourd'hui ? Alors, confrontés à un désengagement massif de l’État, les départements doivent ils se placer sur son terrain, comme par exemple avec les partenariats public privé pour financer la construction des collèges ? Nous ne le pensons pas et nous y reviendrons dans un prochain billet. Pour desserrer l’étau, le vote des 20 et 27 mars va peser.
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire