LE BLOG DES COMMUNISTES DE ROMAINVILLE

lundi 29 avril 2019

DROIT DU TRAVAIL. « ILS ONT LIBÉRALISÉ AU LIEU DE LIBÉRER »


Les députés PCF ont obtenu un débat sur les ordonnances travail, un an et demi après la promulgation de ce chèque en blanc fait au patronat. Entretien avec Pierre Dharréville.
Quel est l’objectif du débat de ce soir à l’Assemblée ?
Pierre Dharréville Il est absolument nécessaire de réclamer des comptes et de tirer le bilan de cette casse sociale lancée par le gouvernement. Ces ordonnances constituent à la fois son premier geste antisocial et son premier contournement du Parlement. Nous nous sommes donc battus pour organiser ce débat dans le cadre de la semaine de contrôle du Parlement. Il se terminera sans doute dans la nuit, soit le 1er mai, Journée internationale des travailleurs. Nous comptons exposer avec force que ces ordonnances n’ont apporté aucun progrès pour les salaires, les conditions de travail ou dans la lutte contre le chômage. Bien au contraire.
L’exécutif voulait faciliter les licenciements pour encourager les embauches…
Pierre Dharréville Faciliter les licenciements pour relancer l’emploi est un sophisme. Comme le consent même le magazine Challenges, force est de constater que les ordonnances n’ont pas eu d’effet notoire sur l’emploi. Dans les freins à l’emploi indiqués par les entrepreneurs, le Code du travail est loin d’être la première préoccupation. En ­revanche, le recours à des ruptures conventionnelles collectives a permis à des grandes entreprises de supprimer massivement des emplois tout en contournant les droits qui sont ceux des salariés dans le cadre d’un licenciement économique. Il y a aussi une multiplication des CDI de chantier et des CDD, ce qui augmente la précarité des travailleurs, impacte les salaires et amène les entreprises à des pertes de d’expérience.
Le gouvernement avait promis de « libérer et de protéger ». Qu’en est-il ?
Pierre Dharréville On a vu libéraliser au lieu de libérer et on n’a pas vu protéger. On nous avait promis une régénération du dialogue social. Où est-elle ? Avec la création au rabais d’une seule instance représentative du personnel, le CSE, le nombre de personnes pourvues d’un mandat syndical est tombé de 36 000 à 24 000 entre le 1er janvier et le 1er juillet 2018. Soit une baisse de 33 %. La suppression des comités hygiène, sécurité et conditions de travail (CHSCT) a déjà un effet néfaste et sera désastreuse à long terme sur les questions de santé. On constate des difficultés à faire valoir ces enjeux centraux. J’ai été rapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur les maladies professionnelles dans l’industrie. Tous les salariés que j’ai rencontrés ont en premier lieu exprimé leur regret profond de la disparition des CHSCT et de pouvoirs et garanties qui allaient avec.
Quid de la situation des tribunaux prud’homaux ?
Pierre Dharréville Le nombre de recours devant les prud’hommes continue de baisser, avec moins 5,5 % en 2018. Cela avait déjà commencé avec la loi El Khomri. Cette baisse ne montre pas que les conflits du travail diminuent, mais que les recours devant les juges sont plus difficiles : il y a de plus en plus de renoncements des salariés à faire valoir leurs droits devant la justice. La barémisation des licenciements abusifs a par contre provoqué une levée de boucliers dans les tribunaux, sur la base des conventions de l’Organisation internationale du travail. Cela nous semble utile aujourd’hui d’interroger le gouvernement sur ces objections. Alors que le pays réclame une hausse du Smic et des salaires que nous avons portée, tout comme le conditionnement du Cice, le gouvernement veut tout confier au marché sur fond de dumping social permanent. Ce n’est pas acceptable.


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