LE BLOG DES COMMUNISTES DE ROMAINVILLE

vendredi 20 mars 2020

« Chair à canon », l’éditorial de Laurent Mouloud dans l’Humanité de ce jour !



Sur les champs de bataille, on appelait çà de la chair à canon. Des soldats de petit garde envoyés au front sans moyen ni espoir d’en revenir. En ces temps de guerre sanitaire, nombreux sont les salariés à avoir désormais le sentiment d’être de la chair à virus, sacrifiée au feu de cet « ennemi invisible » baptisé Covid-19. Caissières, livreurs ubérisés, manutentionnaires, maçons, éboueurs…Des centaines de milliers de travailleurs précaires, sans maison secondaire ni télétravail, se retrouvent aujourd’hui en première ligne de la contamination, obligés de venir trimer sous la pression d’employeurs qui s’inquiètent plus de la survie de leur chiffre d’affaires que de celle de leurs employés.

À l’heure du confinement général l’irresponsable avidité de certaines entreprises de secteurs « non essentiels » doit être dénoncée. Face à une juste inquiétude, ces patrons sans scrupules continuent de faire comme si de rien n’était, l’œil rivé sur leurs profits et la meilleure manière de contraindre les petites mains du prolétariat. Depuis trois jours, les syndicats recueillent des témoignages accablants. Refus d’accepter des temps partiels ou de fournir des protections, obligation de prendre des congés payés, chantage au licenciement. Certains semblent prêts à toutes les turpitudes sociales pour engranger quelques euros de plus. La palme du cynisme revenant au géant de la distribution en ligne Amazon, riche à milliards, qui menace de ne plus payer ses employés qui exerceraient leur droit de retrait pour des raisons sanitaires. Entre sauver ses bénéfices et sauver les humains, la firme de Jeff Bezos a choisi !

Cette indécente démonstration, dont les salariés les plus fragiles font prioritairement les frais, a semblé choquer jusqu’au ministre de l’Économie, Bruno Le Maire. Il a jugé ces pressions « inacceptables ». Las, les belles paroles ne font pas illusion. Dans sa gestion hasardeuse de la crise du coronavirus, le gouvernement est directement responsable d’avoir envoyé des mesures de protection à la libre appréciation des entreprises. La start-up nation vit toujours dans l’illusion infantile de l’autorégulation du marché et la confiance aveugle dans le patronat. Même, malheureusement, lorsqu’il s’agit de sauver la chair à canon du capitalisme.

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