LE BLOG DES COMMUNISTES DE ROMAINVILLE

jeudi 8 avril 2010

Qui veut la peau du Salon du livre et de la presse jeunesse ?

Suite à la pétition lancé par l’équipe du Salon du livre et de la presse jeunesse et mise en ligne ici, la semaine dernière, nous publions cet article très intéressant paru dans l’Humanité.

Si vous n’avez pas encore signé la pétition, vous pouvez le faire ici

Le conseil général de Seine-Saint-Denis vient d’annoncer qu’il envisageait d’amputer de 80% la subvention accordée au Salon. Face à cette mesure couperet, auteurs, illustrateurs, éditeurs, bibliothécaires, enseignants et lecteurs se mobilisent.
Le Salon du livre et de la presse jeunesse en Seine Saint-Denis, la plus importante manifestation de ce type en Europe, est aujourd’hui menacé. Et par qui ? Par son « coproducteur » et principal financeur, le conseil général de Seine-Saint-Denis.

Au mois de février l’équipe organisatrice faisait part de son inquiétude, le conseil général envisageant de réduire de façon « drastique » sa subvention au Salon. Effectivement, il n’y allait pas de main morte : au lieu du 1,6 million prévu, déjà en réduction de 200 000 euros par rapport à 2008, la subvention départementale passerait à 600 000 (voire 400 000 euros), soit une baisse de 1 à 1,2 million d’euros. En bref, cela reviendrait à l’amputer de 80 % par rapport à son montant de 2009.

Principale raison invoquée : le mauvais état des finances du département. En cause, la suppression de la taxe professionnelle qui grève de manière conséquente le budget ; la compensation insuffisante de charges de l’État transférées aux collectivités territoriales dont le manque à gagner prévu est énorme ; l’augmentation des charges contraintes, comme l’aide sociale. Une situation financière qui pèse sur l’ensemble des dépenses et qui n’épargne aucun département. En Seine-Saint-Denis, cette situation a provoqué ces derniers mois une mobilisation de grande ampleur de tous les acteurs de la culture, par pétition interposée, relayée par les élus de gauche de Seine-Saint-Denis et en particulier du président du département, le socialiste Claude Bartolone. Le conseil général va voter demain un budget en déséquilibre, pour dénoncer ces pratiques étatiques, d’ailleurs sanctionnées par le Conseil d’État, qui asphyxient les budgets des collectivités territoriales.

Aussi la surprise est-elle de taille quand, après tant d’agitation de la part des autorités départementales, la proposition de réduction du budget de la culture (environs 2 millions d’euros) concerne — pour l’essentiel — le Salon du livre et de la presse jeunesse. Et, surtout, Livres au trésor, association qui œuvre en parallèle et en osmose avec le Salon, et dont l’action à long terme et de proximité par l’entremise de partenaires essentiels — l’Éducation nationale mais aussi des bibliothécaires, des documentaristes de l’ensemble des villes du département — assure un maillage territorial unique, précieux et audacieux sur ces questions fondamentales de la lecture et du livre dans un des départements les plus pauvres du pays. Á elles deux, elles ont le redoutable honneur de concentrer 60 à 70 % des réductions envisagées.

Tactique politique ?

Quelle mouche a donc piqué M. Bartolone et ses conseillers ? Sans chercher à plonger dans les arrière-pensées des responsables départementaux, on peut comprendre que concentrer le tir sur le Salon, emblème de l’alliance entre action culturelle et action sociale, c’était, au minimum, s’attaquer à un symbole tellement fort que cela obligerait tous les intervenants à bouger. Ceci pourrait expliquer la communication paradoxale du conseil général, qui n’hésite pas à en rajouter sur le thème « Le Salon risque de disparaître ». Un tel positionnement repose sur une double ambiguïté. Apparaître comme le premier défenseur des victimes de ses propres décisions, et renvoyer toutes les responsabilités au niveau du gouvernement. D’autre part, la décision de « cibler » une manifestation aussi connue que le Salon permet aussi de renvoyer la balle dans le camp des autres partenaires, région Île-de-France, Ville de Paris et accessoirement ministère de la Culture. Mais ce qui relève de la tactique politique ne tient plus quand on sait que le budget de la culture du département atteint à peine 1 % du budget total et que de telles « économies » ne rééquilibreront en rien son déficit. On peut alors s’interroger sur de tels choix qui visent à grignoter sur les finances de la culture quand, justement, en temps de crise économique, sociale et morale, elle devrait être préservée de cette logique comptable.

Du côté du Salon, on rappelle, à juste titre, que la manifestation en tant que salon d’éditeurs « ordinaire », n’est nullement compromise. Cette composante est en effet autofinancée par les locations de stands aux éditeurs, comme c’est le cas pour le Salon du livre de Paris. Ce qui est compromis, en revanche, c’est toute l’action culturelle et sociale en amont et pendant le Salon, en direction des publics défavorisés. C’est ce qui fait l’âme du Salon, son caractère unique. C’est ce qui le distingue des autres Salons dont la logique économique prime sur la logique d’accompagnement et d’initiation des publics aux livres et à la lecture. Sans cela, il ne serait plus le rendez-vous spécifique qu’il a toujours été, et que soutiennent tous les auteurs, illustrateurs et éditeurs jeunesse dont le nombre, comme en témoigne la liste des signataires de la pétition sur Internet, ne cesse de croître. C’est à ce Salon-là qu’on veut couper les ailes.

Alain Nicolas et Marie-José Sirach – L’Humanité

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