« GENEVIÈVE, ZAINEB, JERÔME ET TOUS LES AUTRES » (MAUD VERGNOL)
« Vous savez, j’ai 73 ans, qu’est-ce qui peut m’arriver ? » lançait samedi
dans un grand sourire Geneviève Legay à un journaliste. C’était avant que la
porte-parole d’Attac ne gise dans une flaque de sang, enjambée avec
désinvolture par un policier. Cette scène se serait passée en Autriche, elle
aurait suscité l’indignation générale. Mais elle a eu lieu à Nice, en France,
où l’on peut désormais priver arbitrairement des citoyens de manifester. Où
l’on envoie l’armée contre des citoyens qui marchent pour dire leur soif de
justice sociale. Où la police peut multiplier les violences avec l’aval du
pouvoir politique. Et le président de la République a franchi hier un pas
supplémentaire. S’il a concédé « un prompt rétablissement » à Geneviève Legay,
c’est pour lui enjoindre d’avoir « un comportement responsable », rejetant sur
elle la responsabilité de ses blessures graves. Qui croira une seconde que
cette femme de 73 ans, avec son drapeau tricolore à la main, représentait
un danger pour la sécurité publique ?
Avec de tels propos, Emmanuel Macron donne carte blanche aux violences
policières, qui ont déjà fait plus de 2000 blessés, 10 «dommages
irrémédiables à l’œil », et tué Zaineb Redouane, 80 ans. « Quand on est
fragile… on ne se met pas dans des situations comme celles-ci », a même osé le
chef de l’État, qui préférerait sans doute que les retraités, saignés à blanc
par ses choix politiques, restent sagement sur leur canapé à regarder les
rediffusions du grand débat. Lors de l’assassinat de Malik Oussekine, en
décembre 1986, Robert Pandraud avait usé d’inepties similaires : « Si j’avais
un fils sous dialyse, je l’empêcherais de faire le con la nuit. » Mais au
lendemain du décès du jeune homme de 22 ans, le ministre Devaquet avait
démissionné, puis le projet de loi avait été retiré… Autres temps, autres mœurs
en Macronie, où le ministre de l’Intérieur demande à ses troupes de s’inspirer
de Clemenceau, encourage les gardes à vue illégales et justifie l’usage systématique
des LBD. Il est grand temps de dire stop, pour éviter d’avoir à compter nos
morts.
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