Patrimoine : le parc de La Courneuve, nature en ville
Article lu ce matin dans "Le Parisien", et rendant hommage à l'action de Georges Valbon et des élu-e-s communistes !
A cheval sur cinq communes, dont La Courneuve, le parc Georges-Valbon, 3e
plus grand espace vert d’Ile-de-France joue à fond la carte de la biodiversité.
Partout autour, les tours, le béton, la grisaille. Soudain,
surgi de nulle part, coincé entre l’autoroute, la cité des 4 000 à La Courneuve
et celle de la Courtille à Saint-Denis, 420 ha de verdure complètement
inattendue. Le parc Georges-Valbon : respiration de près de deux millions de
visiteurs chaque année. Son histoire, récente, est intimement liée à celle de
la Seine-Saint-Denis.
Construit en même temps que la
Seine-Saint-Denis
Colonne vertébrale du parc, le clapotis de l’eau a
remplacé le brouhaha du bidonville. « Après guerre, de nombreux Espagnols se
sont installés dans la plaine maraîchère de La Courneuve », rappelle Benoit
Pinsseau, chef de service du parc Georges-Valbon. Au fil des années, Portugais,
Algériens, Yougoslaves… viennent grossir les rangs de « la campa » (NDRL :
campagne, en espagnol ) jusqu’à en faire l’un des plus peuplés de
Seine-Saint-Denis. Le parc naît, puis grandit, en même temps que le bidonville
vieillit, puis disparaît.
Vu du ciel, deux espaces distincts se dessinent. Le
premier, au sud, est le plus ancien. Il date du début des années 1960. La
végétation est plus dense, les allées plus larges, les constructions plus
géométriques. A l’origine, il s’agit de créer, au Nord de Paris, l’équivalent
des bois de Boulogne ou de Vincennes. Avant de migrer sur L’aire des Vents en
1999, juste à côté, la Fête de l’Huma rassemble, ici, des centaines de milliers
de personnes pendant 25 ans.
L’ambiance est différente sur l’autre rive du grand
lac, imaginée dix ans plus tard par les paysagistes Allain Provost et Georges
Samel. Le relief, plus marqué, est artificiel. Ce qui implique des travaux
pharaoniques : « 15 millions de m3 de terre ont été déplacés pour modeler ce
paysage unique », souligne Benoit Pinsseau. « L’équivalent de quatre pyramides
de Khéops », écrit Allain Provost dans le livre qu’il consacre au parc en 2005.
Grimpez en haut d’un belvédère et il y a de fortes
chances que vous fouliez les déblais du trou des Halles, des tours de La
Défense ou de l’A86. Depuis la plage, « le boisement, en face, est composé comme
une palette de peintre, avec des dégradés de couleurs », s’enthousiasme Justine
Rigault, adjointe du chef de service.
Là-bas, les chemins tortueux — « on dirait des
spaghettis » —, invitent les promeneurs à se perdre, loin des tracas du
quotidien. Evidemment, sauf à pousser jusqu’à l’étang des brouillards, la ville
n’est jamais loin. Il suffit de lever les yeux pour voir les immeubles. Mais
les arbres jouent un rôle protecteur.
Les essences, de ce côté, sont aussi plus rustiques.
La cerisaie et le vallon, au nord, s’opposent à la roseraie et la vallée des
fleurs, au sud. « Les paysages sont plus sauvages, plus naturels », fait
remarquer Benoit Pinsseau.
Peu d’arrosage, pas de pesticide : très tôt, le parc
applique une politique de préservation de l’environnement. Au pied des
cascades, une multitude de petites îles inaccessibles servent de nid à de
nombreuses espèces d’oiseaux.
En s’approchant de la grande prairie, on distingue un
passage. Pas vraiment un chemin, plutôt une suggestion : l’herbe est tondue à
ras. Il suffirait de se déchausser pour se laisser chatouiller par le gazon. «
Vous avez le droit ! », insiste Justine Rigault. Regardez tout de même où vous
mettez les pieds, c’est aussi le terrain de chasse privilégié du crapaud
calamite, petit protégé du parc.
55, avenue Waldeck-Rochet, à La Courneuve. Ouvert tous
les jours de 7 à 21 heures du 1er mai au 31 août. Accès libre.
ON DÉCOUVRE... de drôles d’oiseaux
Les amateurs pourront aussi observer le butor étoilé,
qui essaie de se faire passer pour un roseau quand il se sent en danger, le
minuscule martin-pêcheur, capable de fondre sur sa proie à 45 km/h, ou le pic
noir qui tambourine tellement fort contre les troncs d’arbres qu’on l’entend à
plusieurs kilomètres. Que les impatients (dont les enfants) se rassurent : pas
besoin d’attendre des heures que Monsieur le blongios nain daigne pointer son
bec pour apercevoir des animaux. Les lapins gambadent joyeusement dans les
prairies, dont certaines sont tondues par des moutons. Et les renards ne sont
jamais bien loin. Ouf !
ON RENCONTRE... Georges Valbon, le père
des espaces verts
Les anciens savent qui c’était mais parlent du « parc
de La Courneuve ». Les moins de 20 ans se retrouvent volontiers au « parc
Georges-Valbon » mais n’ont pas la moindre idée de qui il s’agit. Et pourtant,
le premier président du conseil départemental a contribué à transformer le
paysage de Seine-Saint-Denis.
Fils d’immigré italien fuyant le fascisme, Georges
Valbon grandit dans le quartier ouvrier de la Dhuys, à Bagnolet. Il a 15 ans
quand la Seconde Guerre mondiale éclate.
Résistant communiste, il s’implique dans la vie locale
peu de temps après la Libération, d’abord au conseil municipal de Bagnolet,
puis à Bobigny. Quand il prend la tête du tout nouveau département, en 1968,
une équation s’impose : à chaque habitant de Seine-Saint-Denis doit
correspondre au moins 12 m² d’espace vert. Il imagine tout un réseau de parcs :
le Sausset, l’Ile-Saint-Denis, la Poudrerie, la Bergère… Autant de projets en
gestation. A sa mort, en 2009, les élus de Seine-Saint-Denis ont choisi de
donner son nom au parc de La Courneuve, le plus grand du département. «
L’objectif de 12 m² est dépassé depuis longtemps. On avoisine désormais les 15
m² », se réjouit Benoit Pinsseau, chef de service du parc George-Valbon.
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