« La désillusion », l’éditorial de Jean-Emmanuel Ducoin dans l’Humanité de demain lundi
Macron n’entend rien. Au
contraire, il assume une sorte de virage en ligne droite, prenant le
risque de nourrir une désespérance exacerbée. Singeant les pires années
sarkozystes, il répond «à droite toute» aux aspirations sociales du pays.
Quelques jours à peine
auront donc suffi pour que la parole présidentielle, tant attendue, se
transforme en désillusion pour une majorité de nos concitoyens. Personne
n’était dupe, certes, mais le fameux effet waouh annoncé à cor et à cri par les
thuriféraires de toute la Macronie a laissé place à un couac monumental
– le désenchantement devient divorce consommé – et, plus encore, à une
rupture fondamentale qui laissera des traces durables dans le rapport du peuple
avec«la» politique.
Emmanuel Macron et son gouvernement nous
avaient annoncé des «mesures puissantes et fortes», après
avoir gagné du temps, mené une campagne électorale aux frais de l’État lors des
prestations solitaires du «grand débat national», tentant d’épuiser une
mobilisation sociale à laquelle ils ne veulent apporter aucune réponse
– la preuve –, tout en cherchant à créer l’illusion d’une démocratie
participative nouvelle dont il ne reste déjà plus rien. Comme prévu, les
lendemains déchantent. Et même les moins courageux des commentateurs patentés
expriment une «déception» qui en dit long sur le climat autour
du chef de l’État…
Rien ne semble atteindre
Jupiter. Les mouvements des «gilets jaunes», les journées intersyndicales, les
mobilisations dans les entreprises, ce que les Français ont exprimé à travers
les cahiers de doléances ou dans les réunions publiques, tout cela a porté une
puissante exigence de dignité et d’égalité, avec des revendications précises:
pouvoir d’achat, justice fiscale, augmentation du Smic et des salaires, de
meilleurs services publics, etc. Macron n’entend rien. Au contraire, il
assume une sorte de virage en ligne droite, prenant le risque de nourrir
une désespérance exacerbée, déchirant peu à peu ce qu’il reste de nos vies en
commun. Plus grave, singeant les pires années sarkozystes, il répond «à droite
toute» aux aspirations sociales du pays.
Une pure folie. L’«acte II» de
son quinquennat débute par des mots qui sentent la poudre :
travailler davantage, allongement de la durée de cotisation donnant droit
à la retraite. Les réactions d’indignation entendues durant l’acte XXIV
des gilets jaunes en témoignent. En attendant celles du premier Mai, où
convergeront toutes les contestations.
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