« LUI ET LE CHAOS », L’EDITORIAL DE MAURICE ULRICH DANS L’HUMANITE DE DEMIAN MARDI
Au gouvernement comme à la République en marche, les éléments de langage,
comme on dit, sont distribués et sans doute l’étaient-ils déjà avant dimanche.
Circulez, il n’y a rien à voir, il ne s’est rien passé et on continue. On nous
assure même que, en réalité, cette seconde place est en fait une victoire
venant parachever ou au moins poursuivre l’œuvre de recomposition politique
entreprise au moment de l’élection présidentielle.
La sanction est pourtant évidente, voire cinglante. Après deux années de
réformes claironnées qui ont été autant de régressions sociales, après tant de
discours sur le monde nouveau que nous étions appelés à voir naître sous nos
yeux, Emmanuel Macron est loin de retrouver en voix les chiffres du premier
tour de la présidentielle. Sans doute la participation est-elle moindre mais,
en s’engageant lui-même pleinement dans la campagne, en en faisant une sorte de
référendum pour ou contre sa politique et, plus encore peut-être, pour ou
contre sa personne, il n’a pas convaincu, il n’a pas rassemblé au-delà de ceux
qui se retrouvent désormais dans sa vision idéologique du monde et des premiers
de cordée. Car c’est un des premiers éléments d’analyse du scrutin. Alors même
qu’il n’obtient que 5 millions de voix, contre plus de 8 millions,
c’est avec une perte massive du côté du centre gauche, en partie compensée par
un apport important de voix de droite, expliquant du même coup la déconfiture
de la liste LR.
Alors, certes, la
droite classique est gravement touchée, la gauche, émiettée, ne l’est pas moins
et un nouveau paysage politique est devant nous. Il est dévasté.
L’affaiblissement de la gauche et de la droite est un danger pour le débat
public et démocratique au profit d’un affrontement binaire. Ainsi les citoyens
n’auraient plus désormais d’autre choix que de soutenir la politique libérale
et de casse des acquis sociaux d’Emmanuel Macron ou celle, tout aussi
désastreuse, fondée sur la démagogie et la xénophobie, du Rassemblement
national. « Moi ou le chaos », nous disait en quelque sorte Emmanuel Macron.
Dans le moment présent, dont on voudrait qu’il ne dure pas, c’est lui et le
chaos.
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