« LA FRANCE » DE JEAN FERRAT FÊTE SES 50 ANS EN 2019

Ma France" reste, dans nos mémoires, comme une des plus belles chansons de Jean Ferrat : une véritable déclaration d'amour à la France et au peuple qui a fait son histoire...
La France
personnifiée, humanisée devient sous la plume de Jean Ferrat l'image d'une
femme aimée à qui on dédie une chanson.
Le poète
s'adresse à elle comme à une maîtresse, ce que suggère bien l'apostrophe
réitérée : "Ma France"... Il alterne la première et la deuxième
personne, instaurant un dialogue avec elle.
Dès la
première strophe, il évoque des paysages variés pour la décrire : "De
plaines en forêts de vallons en collines...", puis des saisons distinctes
" du printemps à tes mortes saisons..." comme pour mieux en souligner
toutes les beautés si bien que le poète ne peut que prolonger indéfiniment son
éloge.
Puis, il
égrène quelques régions qui lui sont chères et en fait des esquisses emplies de
poésie :
"Au
grand soleil d'été qui courbe la Provence
Des genêts de Bretagne aux bruyères d'Ardèche..."
Des genêts de Bretagne aux bruyères d'Ardèche..."
Des images
qui restituent des ambiances, des paysages dans leur simplicité et leur
vérité... Ferrat décrit la France, comme le ferait un peintre, avec des
couleurs, des formes...Mieux que personne
Et la
chanson n'est pas seulement une déclaration d'amour à un pays, elle est aussi
un texte engagé qui souligne une soif de liberté et de justice inextinguible...
« Cet air de liberté » qui
caractérise la France, qui a fait sa réputation "au-delà des
frontières" et qui nous vient de la Révolution est bien ancré dans l'histoire.
Puis, le
poète égrène tous ceux qui ont construit cette France dans une énumération qui
mêle hommes illustres et anonymes : "le vieil Hugo tonnant de son
exil", "des enfants de cinq ans travaillant dans les mines", des
ouvriers représentés par des "mains qui ont construit des usines...",
la France fusillée lors de la Commune…
Puis, des
artistes engagés sont convoqués, "Picasso, Eluard" qui ont lutté pour
la paix, et qui ont dénoncé les horreurs de la guerre.
Leur message se perpétue pour dire qu'il est "temps que le malheur succombe".
Leur message se perpétue pour dire qu'il est "temps que le malheur succombe".
Et toutes
les voix de ceux qui font la France sont associées en une seule, comme pour
former une belle harmonie et une belle unité... une voix vouée aux sacrifices,
aux "fosses communes" : le poète dénonce les gouvernants, ceux
pour qui souffrent les travailleurs, en les interpellant, avec l'emploi de
l'adjectif possessif de la deuxième personne "vos crimes, vos
erreurs..."
Ferrat rend
hommage aux travailleurs, au petit peuple, à cette France "qui ne possède
en or que ses nuits blanches…Pour la lutte obstiné de ce temps
quotidien..."
Une France
dont Ferrat nous fait percevoir tout le labeur, avec pour seul trésor "ses
nuits blanches". L'association du mot "or" avec l'expression
"nuits blanches" restitue toute la valeur du travail fourni par les
plus humbles.
Le peuple est ainsi magnifié dans cette lutte quotidienne qu'il mène pour faire vivre le pays...
Le peuple est ainsi magnifié dans cette lutte quotidienne qu'il mène pour faire vivre le pays...
Une lutte
pour travailler, une lutte, aussi, pour dénoncer les injustices symbolisées par
"l'affiche qu'on colle au mur du lendemain." « Au journal que
l’on vend un matin du dimanche »
Et Ferrat
évoque cette France qui se révolte dans cette expression bâtie sur une
antithèse frappante de verbes de mouvement : "qu'elle monte des
mines, descende des collines."
Le poète
s'associe à cette France, avec ces mots : "celle qui chante en
moi", soulignant ainsi sa complicité et sa solidarité.
Désignée
par les adjectifs "la belle, la rebelle", la France est de nouveau,
magnifiée et valorisée, dans ses révoltes mêmes.
"Celle
qui tient l'avenir serré dans ses mains fines", à nouveau personnifiée, la
France des travailleurs mérite d'être célébrée.
Et dans le
dernier vers, le poète évoque d'autres mouvements populaires célèbres dans
cette expression : "Trente-six, soixante-huit chandelles".
La mélodie
qui alterne douceur et force traduit à la fois tendresse et révolte.
Bel hymne à
la liberté, cette ode à la France, à ses travailleurs, ses artistes traduit
l'attachement du poète à ce pays si riche d'histoire, de révoltes, de luttes...
L'artiste
censuré
La
diffusion de sa chanson Nuit
et brouillard est « déconseillée » par
le directeur de l'ORTF, mais le public suit, et l'album Nuit
et brouillard obtient le prix de l'Académie Charles-Cros.
À la sortie en 1965 de l'album Potemkine, les problèmes de censure recommencent de plus
belle. Georges Coulonges, le parolier de la chanson-titre a pourtant pris des
gants, il écrit « M'en voudrez-vous beaucoup… ».
En 1966, il est interdit de petit écran, sous le
prétexte de sa candidature sur la liste PCF aux élections municipales d'Antraigues (Ardèche).
Les déboires de Jean Ferrat se poursuivent en 1969 avec
la sortie de l'album Ma France,
dont la chanson éponyme est interdite d'antenne, provoquant son boycott
des plateaux de télévision. Jean Ferrat n'y retourne qu'en 1970 et
doit patienter un an de plus pour voir la censure brisée par Yves Mourousi,
qui diffuse en 1971 un
extrait de Ma France!!
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