« FAUX DÉBAT », L’EDITORIAL DE JEAN-EMMANUEL DUCOIN DANS L’HUMANITE DE DEMAIN MARD
Chacun a pu juger : le plan de com est retombé. Ceux qui ont cru – ou
fait semblant de croire – au « grand débat » savent désormais à quoi s’en
tenir. Finalement, l’incroyable faculté d’Emmanuel Macron à avoir réponse à
tout ne signifie rien ou pas grand-chose, comme dans les quiz de fin de semaine
où le plus « sachant » n’a pas toujours la tête du plus « savant ». Fini le
syndrome Question pour un champion. Après la fascination surjouée du président
en bras de chemise tenant le micro durant des heures, voici venu le premier
bilan. Il est à l’image de sa lettre aux Français, qui inaugurait bien mal ce
cycle de débats. Après avoir promis qu’il n’y aurait « pas de questions
interdites », la longue liste des interdits et des contraintes, certes annoncés
dans la fameuse missive, balise depuis les prestations publiques, dont on voit trop
bien la destination finale. Outre que le chef de l’État se comporte (à longueur
d’antenne) en VRP de l’entreprise France disposant de la toute-puissance d’un
énarco-technicien de dossiers, il se conduit surtout, à cent jours du scrutin
européen, en bateleur de campagne électorale…
La sous-estimation de la question sociale, sans parler de celle de l’enjeu
démocratique et citoyen, en dit long sur ses intentions, comme s’il ne
sollicitait que les côtés ultraminoritaires d’un mouvement qui lui échappe totalement.
D’autant que cette insurrection citoyenne des gilets jaunes tend à prendre
depuis peu des formes originales, comme ce fut le cas dans la ville de
Commercy, lors d’une Assemblée des assemblées, qui a imposé des thèmes
rassembleurs dont le président ne veut pas entendre parler.
Ne le cachons pas : le risque pris par Emmanuel Macron est
historiquement périlleux. Pas seulement pour lui, mais pour la France. La
déconvenue du faux débat frappe déjà l’opinion en plein cœur ; et cette opinion
est enflammée. Les effets prévisibles de cette désillusion de grande ampleur
risquent de s’ajouter aux conséquences de la répression féroce et intense qui
s’abat chaque samedi. Et dire qu’il escompte, de cette manière, poursuivre son
remodelage libéral du pays…
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