« PRÉVENTION SOCIALE », L’EDITORIAL DE PAULE MASSON DANS L’HUMANITE DE DEMAIN MERCREDI 9 JANVIER
Depuis lundi soir, les arrestations préventives, c’est-à-dire autorisées
pour un délit qui n’est pas commis, ont pris le chemin d’une possible
inscription dans la loi. Après la répression musclée des manifestations, la
« sévérité exemplaire » des sanctions, les 5 600 personnes placées en garde à
vue, l’humiliation des lycéens genoux à terre mains sur la tête, les tirs
répétés de Flash-Ball et de grenades, voici venu le bâillon pour les profs et
le fichier des interdits de manifester. Ce gouvernement glisse à bas bruit vers
le fracas des régimes répressifs et autoritaires. Plus il joue le
pourrissement, plus il attise les frustrations.
À l’heure où des dizaines de milliers de citoyens hurlent leur colère
contre la mal-vie, l’insécurité sociale et la confiscation de la démocratie, la
réponse sécuritaire ne fait que nourrir la détestation d’un pouvoir sourd aux
revendications. Et provoquer la violence. Personne ne peut s’en réjouir. Mais
cette révolte populaire porte une exigence de changements qui va bien au-delà
de 10 milliards de miettes sociales payées par nos impôts et d’un « grand débat »
déjà rapetissé par l’affirmation qu’il n’y aura pas de changement de cap
politique.
Les maires des petites communes qui ont ouvert dans leur mairie des cahiers
de doléances résument ainsi ce qui en ressort : « La préoccupation, c’est
pouvoir d’achat, pouvoir d’achat, pouvoir d’achat. » La meilleure prévention
contre la violence est une réponse politique à la hauteur, qui s’attaque à la
répartition des richesses, rétablit l’ISF, finance les services publics,
augmente le Smic et rend du pouvoir au peuple. Après huit actes de gilets
jaunes, ces revendications non formulées au départ sont devenues un minimum. Le
mouvement ne s’est pas éteint avec la trêve des confiseurs. Il connaît même un
regain de mobilisation et garde le soutien de la population. La fronde dure.
Depuis leur cabane fichée sur un rond-point, les gilets jaunes de Commercy en
appellent à une assemblée des assemblées. « Serions-nous au début d’un tsunami
historique ? » questionne le sociologue Edgar Morin.
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