« JUPITER ET TÊTES DE VEAU », L’EDITORIAL DE MICHEL GUILLOUX DANS L’HUMANITE DE DEMAIN LUNDI
Comment se tromper de numéro et passer d’un Louis à l’autre. Sa modestie acceptait depuis son élection le sobriquet de Jupiter – ainsi que le roi
dit Soleil apparaissait déguisé sur les tableaux d’époque. C’est sans doute en
regard de cet auguste parrainage qu’Emmanuel Macron affectionne la galerie des
Glaces, au point d’y convier les vrais privilégiés d’aujourd’hui. Et puis
l’esprit versaillais, depuis Thiers, n’est sans doute pas pour lui déplaire.
Mais en retenant ce lundi 21 janvier, date de la royale décollation de 1793 sur
la place qui jouxte l’actuel palais de l’Élysée, le symbole tourne au splendide
lapsus. Tête de veau et sauce gribiche agrémenteront-elles le menu ?
Le même jour, Attac et Oxfam apportent leur touche à l’acte d’accusation
d’un système. En France, le fruit du travail humain est détourné par les
groupes du CAC 40 dans des proportions insupportables. L’argent versé aux
rentiers du dividende a bondi de 40 % en sept ans, au prix de la suppression
d’un emploi sur cinq ! Quant à ceux que le chef de l’État reçoit à sa table,
ils illustrent le gratin de la planète finance que résume cet autre chiffre :
26 ultrariches possèdent autant que près de 3 milliards des plus pauvres
habitants de notre terre commune qui ne tourne plus rond ; ils étaient 43 en
2017. De suppression de l’ISF en perpétuation du Cice en passant par
l’étranglement des ressources locales et de solidarité, le rouleau compresseur
gouvernemental alimente ce torrent d’injustices qui déborde les frontières.
C’est bien l’insupportable de ce quotidien qui fait réagir à juste raison
nombre de femmes et d’hommes en gilets jaunes et fait s’interroger autant de
syndicalistes sur les chemins communs à trouver, dans le respect de chacun.
Tout cela dérange Emmanuel Macron, adepte lui aussi du verrou, appliqué à
son « grand débat », déjà en passe d’être débordé. Il retrouve là un autre
point commun avec son opposante désignée. Lançant samedi sa campagne
(européenne ? présidentielle ? on ne sait) au Thor, dans le Walhalla, pardon le
Vaucluse, Marine Le Pen n’a eu de cesse de jouer de son registre favori de
haine et de division. Pas un mot bien sûr sur le fond des choix libéraux qui
écrasent tout, mais l’argument xénophobe brandi méthodiquement pour dévier
chaque exigence sociale des gilets jaunes. Là, ce n’est pas un acte manqué mais
de la vulgaire.
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