« Le fromage de l’intérêt public », l’éditorial de Patrick Appel-Muller dans l’Humanité de ce jour !
Le gouvernement
vient d’annoncer le plus formidable plan de suppression d’emplois de l’après-guerre :
120 000 fonctionnaires rayés de la carte par une sorte de rupture
conventionnelle collective. Alors qu’on manque de postes dans les Ehpad et dans
la police, dans la justice et dans l’enseignement, dans les prisons et dans la
culture, Édouard Philippe veut aggraver la situation en généralisant les
emplois précaires. La première victime visible, c’est le statut des
fonctionnaires. Leurs instances représentatives vont être rabougries et la
généralisation de la rémunération au mérite a pour objectif de ture la haute
idée que ces salariés se font de leur mission pour leur substituer les œillères
de la docilité. La mise en cause de leur statut menace la nature même des
services rendus à la population, la garantie d’une continuité des actions
publiques, le fait qu’ils sont au service de la loi et du contrat social et non
soumis à des gouvernants de passage.
Les missions
de service public peuvent devenir des fromages et Emmanuel Macron veut en
couper de larges parts pour servir les intérêts privés. La sous-traitance à laquelle
il entend recourir va faire primer la rentabilité sur le service dû aux
citoyens. Ce qui rapporte doit être offert à ceux qui empochent déjà tant. La multiplication
de contrats avec le privé va étendre le gâchis des Partenariats Public-Privé
(PPP), qui a déjà coûté si cher aux finances de la nation. Ajoutez-y une
nouvelle vague de privatisations, et vous compléterez le tableau d’un pillage.
Cette formidable marche arrière remettrait en
cause ce que la République a construit durant des décennies, ce qui a fait sa
force et une part de l’adhésion de notre peuple. La droite même n’avait jamais osé aller si loin. La question de
Jaurès, « pourquoi la politiques est-elle devenue perméable aux intérêts
financiers ? », réclame non seulement une réponse sociale mais une
solution citoyenne. Rien dans le cours des sociétés n’est inéluctable.
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire