« Justice et connaissance », l’éditorial de Maurice Ulrich dans l’Humanité de ce jour !
Le récit
que nous publions est d’une violence qui serait insoutenable s’il ne venait
soulever la chape de plomb qui pèse encore sur la guerre d’Algérie et la
torture, pratiquée non seulement par les unités de sinistre mémoire mais aussi
par des appelés. Elle a été peu évoquée, dans de trop rares témoignages,
quelques documentaires. Dans Muriel, le film d’Alain Resnais ; dans le
roman de Pierre Bourgeade, les serpents ; par Pierre Guyotat dans tombeau
pour cinq cent mille soldats…Il ya toujours des non-dits et le silence des
appelés en est un, rompu aujourd’hui comme il l’a été à de trop rares reprises.
Combien de jeunes hommes en sont revenus, à jamais détruits de l’intérieur ?
Comment oublier celui-ci, sur une plage de Normandie, s’effondrant
littéralement avec des sanglots qui ne cessaient plus parce qu’il s’était juste
écorché le pied. « J’ai vu trop de sang là-bas ! » avait-il pu
seulement balbutier à la mère de famille qui s’était inquiété de lui.
Ce
même récit est sans doute une pièce essentielle pour contribuer à la
manifestation de la vérité dans la disparition du jeune mathématicien
communiste Maurice Audin. Cédric Villani, dans une récente interview dans nos
colonnes, se disait confiant dans la volonté du président de la République de
faire toute la lumière sur cette affaire. On connaît les mots d’Emmanuel Macron
sur la colonisation. Mettre en œuvre une véritable enquête sur la mort de
Maurice Audin serait un nouveau pas dans la mise au jour de ce que fut cette
guerre qui résiste encore à dire son nom.
Des voix
s’élèvent toujours dans ce qu’elles appellent « la repentance ». Ce
sont ces mêmes voix qui ont prospéré sur ces non-dits en alimentant les thèses
racistes et la haine qui se sont répandues dans trop de consciences. On connaît
cette phrase célèbre : « Un peuple qui oublie son passé est condamné
à la revivre. » D’une manière ou d’une autre…Établir la vérité sur la
disparition de Maurice Audin comme sur tout ce qui s’est passé, il n’y a pas si
longtemps, pas si loin, c’est peut-être faire œuvre d’histoire, il le faut d’ailleurs,
mais c’est choisir la justice avec la connaissance, aujourd’hui et pour demain.
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire