« La guerre sans nom », l’éditorial de Michel Guilloux dans l’Humanité de ce jour !
Lille
rayé de la carte, ainsi que Lens, voire Le Havre, selon que l’on s’en tienne
aux chiffres officiels ou pas…Pardon aux habitants de nos cités, voilà de quoi
se représenter ce qu’il se passe au Mexique depuis plus de dix ans maintenant. Plus
de 200 000 hommes et femmes sont morts. Plus de 35 000 autres sont
portés disparus, six fois plus si l’on retient le taux de non-enregistrement
des plaintes reproché aux autorités. Dans les médias et les chancelleries, on
parle de « vague de violence », comme si ce phénomène avait la
régularité apolitique des marées. La faute à pas de chance ? Des vies
inutiles ? Comme celles de ces 43 élèves instituteurs en lutte d’Iguala. Une
enquête officielle aura tout fait pour maintenir la responsabilité du massacre
au niveau local, élus, carte, police municipale…Un mouvement aura obligé le
gouvernement mexicain à en appeler à des experts internationaux, partis avec
pertes et fracas du pays. Leurs investigations mettraient en cause le trafic de
drogue et la corruption, certes, mais commençaient à mettre au jour des
connexions avec l’armée et des échelons supérieurs.
L’actuel
président s’est fait élire comme « candidat des femmes », après avoir
occupé le poste de gouverneur de l’État capitale, qui s’est avéré être celui de
l’autre plaie du pays, le féminicide de masse, souvent commis par les mêmes. Depuis,
la pauvreté a explosé ainsi que les inégalités. Et le pétrole, symbole s’il en
était de la souveraineté nationale, privatisé. Des milices répriment la
contestation sociale. L’armée se voit voter une loi lui garantissant l’impunité
la plus totale. L’année 2017 a vu le nombre de morts imputés au crime organisé
croître de moitié. Un record, paraît-il.
L’argent,
la drogue, le pouvoir : trilogie d’une gangrène contemporaine, dont on
voit là où elle commence et pas comment l’arrêter sans frapper au plus haut, et
avec toutes les armes, à commencer par la plus puissante ici : celle des
échanges économiques. La France el l’Union européenne en auraient le pouvoir, à
l’heure de renégocier un nouveau traité de libre-échange, l’année d’une
nouvelle élection présidentielle. En ont-ils la volonté ? La guerre sans
nom qui se livre là a une unique cible : le peuple mexicain lui-même.
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