« Une réforme ? Non, un projet de société », l’éditorial de Sébastien Crépel dans l’Humanité de ce jour !
Ils avaient
parié sur la mort des syndicats, ils ont eu les gilets jaunes. Un an plus tard,
alors qu’ils ont échoué à écraser la France des ronds-points, les gens du « nouveau
monde » aux commandes font désormais face à la résurgence d’un front
syndical uni, dont ils n’imaginaient pas, il y a quelques semaines encore, que
les mots d’ordre ou les modes d’action rencontreraient à ce point l’aspiration
majoritaire des Français.
Un spectre,
désormais, hante le pouvoir : celui d’un mouvement social qui, en faisant
le plein de confiance, unisse dans son giron toutes les forces de bonne
volonté, jusqu’alors éparpillées par le sentiment d’impuissance et de
désespoir. Il deviendrait alors irrésistible. Pas de système de retraites
dignes sans recettes dynamiques. Pas de cotisations sans emploi ni salaires. Et
qui dit plus d’emplois et de salaires dit d’autres modes de production et e
répartition des richesses, et nouveaux pouvoirs pour en décider. Salariés,
étudiants, chômeurs, retraités, femmes et hommes, cadres des villes ou ouvriers
des campagnes : tous concernés.
Ce n’est
pas une simple réforme qui est en jeu, c’est un projet de société. Celui du
gouvernement repose sur deux piliers : la destruction des repères
collectifs – les notions de durée de cotisation, de salaire de référence ou de
taux plein sont obsolètes, chacun étant renvoyé à son compte individuel de
points – et l’ajustement permanent du niveau des retraites par une technostructure
– réglage de la valeur du point, de « l’âge pivot », etc. le but :
adapter, dans le sillage de ce qui s’est fait pour le droit du travail, le
système de protection sociale aux standards d’emploi de la mondialisation, à
base de précarisation des statuts et des salaires et de chômage élevé. Un modèle
pauvre en cotisations, incompatibles avec des retraites de bon niveau, mais à l’économie
suffisamment flexible pour épouser, sans déficit ni repartage des richesses,
les crises du capitalisme de demain. Ce projet, et avec lui la société qu’il
dessine, est rejeté. Un autre cherche sa voie dans le chaudron de la
mobilisation.
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