« La leçon », l’éditorial de Laurent Mouloud dans l’Humanité de ce jour !
Personne,
à ce jour, ne connaît exactement la teneur des arbitrages d’Édouard Philippe. Mais
une chose est sûre : le grand oral du premier ministre sur la réforme des
retraites, annoncé pour mercredi, va longuement aborder le sort des 870 000
enseignants. Avec 70% de grévistes dans les écoles jeudi dernier, la profession
est devenue l’un des fers de lance de la mobilisation. Et, pour le
gouvernement, une très grosse épine dans le pied. En l’état, compte tenu des
faibles salaires que touchent les enseignants, le régime par points se
traduirait par une perte de 300 à 900 euros par mois sur leurs futures
pensions. Des chiffres que personne ne conteste. Et qui offrent une accablante
démonstration du recul social que peut produire la réforme.
L’exécutif
le sait bien. Et tente d’éteindre l’incendie à grands renforts d’entourloupes
budgétaires. Juré, craché, les pensions des profs « ne baisseront pas »,
répète le premier ministre. Tandis, que la mine grave, Jean-Michel Blanquer
fait miroiter des augmentations à hauteur de « 400 millions d’euros à
partir de 2021 ». Le nombre à trois chiffres claque. Mais pas de quoi s’évanouir.
Assurer le niveau de pension actuel en revalorisant les salaires nécessiterait
au bas mot un budget de 10 milliards ! Ces 400 millions ? Ils ne
représenteraient qu’une quarantaine d’euros mensuels par enseignant. Très loin
du compte.
Le bonneteau
de Blanquer et consorts ne suffit pas à amadouer les profs. La confiance est
brisée. Et la colère profonde. À l’image d’autres secteurs, cette réforme
inique des retraites a agi comme un détonateur pour une profession à bout, matraquée
par les réformes (lycée, Parcoursup) exaltant les vertus de l’individualisme et
épuisée par l’instauration d’un « new management » aussi absurde qu’autoritaire.
Dans la rue et en grève, ces enseignants ne défendent pas que leurs futures
pensions. Ils se battent pour une société où la solidarité – des retraites
comme dans leurs classes – reste une valeur cardinale. Une leçon que le
gouvernement serait bien inspiré de réviser.
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