LA CHRONIQUE DE BARBARA ROMAGNAN (DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR) Un point de non-retour !
J’ai
signé l’appel à la manifestation du 10 novembre contre l’islamophobie, j’y suis
allée, j’ai beaucoup aimé et çà m’a donné de l’espoir dans une période qui ne s’y
prête guère. Si j’entends, comprends ou partage certaines réserves de ceux et
celles qui n’ont pas voulu en être pour cette fois, je n’ai jamais douté de l’opportunité
de participer à cette mobilisation.
Les discours
de haine de plus en plus banalisés, les humiliations (la mère voilée au Conseil
régionale de Franche-Comté, à Besançon, où je vis), la violence, l’attentat de
Bayonne… : c’est un point de non-retour. Depuis tant d’années que la
xénophobie et le racisme visent nos compatriotes issu du monde musulman et
alors qu’ils sont désignés (politiquement, médiatiquement, idéologiquement) à
la vindicte, il était temps de réagir. C’était l’objet de la mobilisation :
dire notre opposition à ces discours de haine, au racisme an général, à celui
dont sont victimes les musulmanes et musulmans (réels ou supposés) en
particulier. Je ne prétends surtout pas donner de leçons. Je suis moi-même
passée à côté d’un autre mouvement populaire très important, celui des gilets
jaunes dans ses débuts. Curieuse et intéressée, j’étais en même temps inquiète
en raison de propos racistes qui en étaient
parfois issus. Sans doute mon inquiétude et mes doutes venaient-ils
aussi du fait qu’il se passait là quelque chose d’inédit, qui m’échappait, qui
ne venait pas des partis politiques, des syndicats, bref, qui ne venait pas de
quelque chose que je connaissais. Et puis j’ai lu, écouté, j’ai participé à des
manifestations et mes réserves ont été dépassées. Celles et ceux que, à gauche,
nous prétendions représenter se mobilisaient eux-mêmes. Ils et elles ont vu s’ouvrir
aux autres, les jeunes des quartiers populaires, victimes eux aussi de la
répression policière, les militants pour le climat. Enfin, la solidarité que
nous aimons tant brandir dans nos discours, ils et elles la pratiquaient
concrètement et sans attendre autour des ronds-points. Malheureusement, la plupart
d’entre nous – les militants politiques de gauche – les avons ratés, nous n’avons
rien compris de ce qui se jouait là.
Je crois
que ce 10 novembre aussi il s’est joué quelque chose d’essentiel, historique,
qui nous oblige. Car c’est un rendez-vous essentiel de la gauche avec elle-même
(ses principes, ses valeurs, ses idéaux) et avec celles et ceux que nous
prétendons défendre et représenter : les classes populaires. Car les boucs
émissaires que désigne l’islamophobie en font partie et ne sont évidemment pas
les émirs et princes du Golfe et de la péninsule Arabique avec lesquels nos
gouvernants commercent sans états d’âme quel que soit l’obscurantisme qu’ils
pratiquent chez eux. Ce dimanche, la manif était belle : du monde, de
beaux slogans, de belles personnes. Que celles et ceux qui ont permis cela en
soient remerciés.
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