« Honnis », l’éditorial de Maurice Ulrich dans l’Humanité de ce jour !
L’annonce,
samedi, par l'Autorité électorale algérienne, des noms des cinq candidats dont
le dossier a été validé pour l’élection présidentielle prévue – en principe –
le 12 décembre a toutes les allures d’une provocation. Elle survient au
lendemain d’une manifestation monstre, comme une véritable marée dans les rues
d’Alger au jour anniversaire, 65 ans après, du début de la lutte pour l’indépendance.
C’est à des centaines de milliers de voix que les manifestants ont fait vivre
cette date unique : l’Algérie veut son indépendance. Indépendance aujourd’hui,
oui, face à ce système qui a volé les espoirs de toute une nation au fil des
décennies. Les cinq candidats retenus ont tous, à des titres divers, été
associés au pouvoir de Bouteflika. Il était devenu une sinistre momie, eux sont
des dinosaures prêts à tout pour maintenir l’ordre ancien fait de corruption,
de soumission aux grands intérêts privés, de mépris de la démocratie, de
cynisme devant les souffrances populaires.
Trop
de printemps des peuples ont tourné court. Mais voici ce qui ressemble dans
quelques parties du monde, et particulièrement au Moyen-Orient en ces jours, à
un automne des pouvoirs honnis. Au Liban, la démission du premier ministre
Hariri, l’appel du président Aoun à la formation d’un nouveau gouvernement n’ont
rien réglé. En Irak, malgré une répression meurtrière qui aurait déjà fait plus
de 250 morts, les manifestants ne renoncent pas et demandent la fin d’un
régime, compromis avec l’administration américaine. Les écoles sont fermées,
comme de nombreux services publics en grève. Longtemps, ces pouvoirs ont tenu
leurs peuples en usant çà et là des rivalités confessionnelles, en les
attisant, an alimentant ailleurs la peur de l’islamisme radical tout en en
poussant les feux. En cet automne, c’est bien plutôt la vie chère, la santé, le
déni de démocratie qui semblent soulever les peuples contre des dirigeants dont
ils ne veulent plus. On pense à ces mots du prix Nobel Peter Handke : « Les
puissants d’aujourd’hui ont perdu leurs sortilèges. »
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