" Rapport politique de la ville " : Intervention de Brigitte MORANNE au Conseil municipal du 3 juillet !
INTERVENTION DE BRIGITTE MORANNE AU CONSEIL MUNICIPAL
DU 03 JUILLET
GROUPE « FRONT DE GAUCHE-ROMAINVILLE
ENSEMBLE »
Présentation
du rapport politique de la ville
Aujourd’hui,
il nous est demandé de prendre acte du rapport annuel 2017 relatif à la mise en
œuvre de la politique de la ville.
Il
est nécessaire pour cela, me semble-t-il de rappeler quel était l’objectif de
cette réforme et quel résultat ?
En
2013, le comité interministériel des villes a impulsé une réforme d’ampleur de
la politique de l’habitat. L’ambition affichée était celle de l’égalité des
territoires. Ce fut en réalité, un terrible aveu de l’échec de la politique de
la ville depuis plus de 30 ans.
La
politique de la ville visait à une politique de rattrapage pour les quartiers
populaires.
Face
au constat d’une détérioration de la situation des quartiers de la politique de
la ville, l’une des solutions séduisantes a été d’incorporer davantage les
habitants aux projets, en les sommant de participer à une vie citoyenne
circonscrite au quartier avec la création des conseils de quartier. On a
façonné donc une identité sociale du quartier.
Pourtant,
5 ans après la mise en œuvre des QPV, les questions d’équité territoriale et
d’égalité de traitement entre territoires sont en échec.
Prenons
l’exemple de notre département, au printemps 2018, un rapport dressait le
panorama des inégalités faites à ce territoire en matière de police, de justice
et d’éducation notamment. « A population égale, la Seine-Saint-Denis est
moins bien traitée que d’autres départements ».
Il
s’agit d’une véritable discrimination d’état. Des inégalités monstrueuses
apparaissent au grand jour, les fragilités sociales se cumulent. Par exemple
sur le territoire d’Est Ensemble, 29% des ménages vivent sous le seuil de
pauvreté contre 18% pour la métropole. La part des ménages imposables sur le
revenu est de 52,4% à Romainville et est inférieure à celle du département qui
est de 54%. Une population globalement jeune, mais un taux de diplômés de
l’enseignement supérieur largement inférieur au taux métropolitain et régional (28,5%
contre 44,6% et 40,4%). Un taux de chômage sur notre ville de 11,6% (ce taux
exclue les non-inscrits) contre un taux régional à 8,1%. La liste des
inégalités de traitement est longue et met à bas les principes mêmes de la
République.
Les
politiques d’austérité menacent la survie même des services publics
départementaux.
Mais
alors, comment tendre vers l’égalité des territoires ?
Le
1er volet est humain. Les habitants des quartiers populaires sont
comme tout le monde : ils veulent un travail, du pouvoir d’achat, se
soigner, un logement, une bonne école et de la culture.
Tout
cela, ce sont des politiques de droit commun qui ne s’adressent pas qu’à la
marge des choses comme la politique de la ville.
La
deuxième chose, c’est un volet urbain, les populations veulent vivre dans de
beaux espaces publics, des appartements où il y a des cloisons suffisamment
épaisses pour disposer d’intimité qui sont suffisamment isolés pour éviter que
les coûts augmentent.
Enfin,
il y a un troisième volet qui est démocratique. Notamment en ce qui concerne le
vote des étrangers. C’est non seulement un droit mais c’est aussi : « Je
donne mon avis sur ce qu’on fait des impôts que je paie ».
C’est
aussi une culture de la citoyenneté. Dans les familles où les parents n’ont pas
le droit de vote, cette culture de la citoyenneté existe moins. Et quand des
jeunes sont contrôlés, fouillés au corps, quatre fois dans la même journée et
quatre fois par les mêmes policiers, c’est une humiliation terrible.
Alors,
comment s’étonner que dans certains quartiers, l’abstention peut parfois friser
les 80%.
Quelle
politique pour les quartiers populaires ?
Il
faut en finir avec l’austérité. La logique de réduction des dépenses publiques
impacte les collectivités et aggrave le chômage.
La
logique d’austérité est incompatible avec la promotion de l’égalité dans les
quartiers populaires.
Il
y a des politiques de droit commun à mettre en place.
Des
dispositifs importants aux élèves en difficulté, il faut démultiplier le nombre
d’adultes dans les écoles. Il ya 40 à 50% de chômage dans certains quartiers,
il faut que les jeunes sortent de l’école avec des diplômes.
Alors
quelle ville de demain pouvons-nous imaginer ?
L’espace
public est extrêmement précieux, il faut développer les espaces collectifs et les
lieux de partage.
La
France a un réseau de villes dont chacune est le fruit d’une histoire.
L’urbanisme doit se construire sur ces histoires. C’est aussi reconnaitre la
dignité des populations, elles ont une histoire. Tout n’est pas parfait dans
l’urbanisme des banlieues mais tout n’est pas à mettre à la poubelle.
Aujourd’hui,
au nom de la mixité sociale, l’ANRU impose d’élaborer des projets urbains
incluant des démolitions de logements sociaux et la construction de logements
intermédiaires et en accession à la propriété. Pourtant, la proximité spatiale
n’engendre pas automatiquement de proximité sociale.
Au
contraire, elle peut déstabiliser le tissu social existant. Souvent, les
démolitions brisent les liens de voisinage qui sont parfois le seul capital social
significatif pour les ménages en difficultés.
Lorsque
le déménagement les conduit dans un quartier de classe moyenne, l’intégration
n’est pas facile.
Cette
dispersion met à mal les réseaux de solidarité et d’organisation politique d’un
quartier populaire. Tout débat collectif est alors biaisé.
Non
la mixité sociale telle qu’elle est entendue aujourd’hui ne vise pas à
l’amélioration de l’habitat populaire mais à sa dilution. On peut se demander
alors les raisons qui motivent la cohésion sociale ?
Pour
cacher les inégalités réelles de la société ?
Pour
réduire les incendies de voitures ? Pour apaiser les tensions et calmer le
peuple ?
Je
terminerai sur l’ANRU GAGARINE, les conseils citoyens ont-ils permis la
participation du plus grand nombre et la Co-construction du projet ?
A
quel moment a-t-il été proposé aux habitants de ce quartier la possibilité de conserver
l’existant en le valorisant ?
Pourtant
des architectes se battent depuis plus de 20 ans contre les démolitions, je
citerai, en particulier, Anne, Lacaton
et Jean Philippe Vassal.
Ils
ont d’ailleurs démontré que l’architecture des années 60-80 offrait beaucoup de
potentiel.
En
conclusion, si nous prenons acte de la présentation du rapport annuel de
politique de la ville 2017,
Nous
constatons que le désengagement de l’état, les inégalités sociales, le manque
de concertation et les politiques d’austérité mettent en échec la politique de
la ville dont le but à l’origine est de réduire les inégalités de territoire.
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