« Désert nourricier », l’éditorial de Paule Masson dans l’Humanité de ce jour !
On crève
de chaud : l’expression fait florès en ces jours de canicule. Mais, loin d’être
un badinage de pause-café, elle révèle maintenant une sourde inquiétude qui
impose peu à peu sa réalité. L’étouffoir de l’été 2018 a fait naître une prise
de conscience : le réchauffement climatique, jusqu’alors lointaine menace,
a imposé son évidence. 2019 sera celle d’une prise de sens. Chaque année est
plus chaude que la précédente. Paris devrait battre son record absolu de
température. La Belgique et les Pays-Bas
ont passé le cap hier. La sécheresse brûle les sols, les arbres, les fruits,
les légumes, le blé, les vignes. Les rivières, les étangs, les nappes phréatiques
s’assèchent. Les éleveurs ne savent plus comment nourrir les troupeaux. Les poissons
étouffent.
Si rien
ne change, et vite, cette canicule-là, qui fait suffoquer le monde jusqu’aux
confins de l’Alaska, n’est qu’un préliminaire à l’étendue du désert nourricier
qui se profile. Le réchauffement climatique menace la souveraineté alimentaire
du monde. Les experts du Giec s’accordent sur un constat implacable les
rendements agricoles pourraient chuter de 10 à 25% d’ici à 2050. Les prix des
ressources de première nécessité vont s’envoler, exposant près de deux
milliards de personnes à la famine. Près d’un milliard d’affamés pourraient
être contraints de migrer vers ces terres plus fertiles.
Face
au coupable déni de réalité qui dicte les décisions politiques, il faut dire ce
chaos à venir. Car c’est le chaos d’un système. Celui des accords de
libre-échange qui encourage l’agrobusiness. Celui de l’accaparement des terres,
de la privatisation des mers, d’un
capitalisme « vert » qui fait de l’économie décarbonée un marché dans
la course aux profits. Il est encore temps de bloquer le thermomètre mais, pour
cela, certains accapareurs de richesses vont devoir être dépouillés de leurs
privilèges.
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire