« Salauds de pauvres », l’éditorial de Jean-Emmanuel Ducoin dans l’Humanité de ce jour !
« Qui
veut noyer son chien l’accuse de la rage. » Où s’arrêtera ce vieil adage
populaire datant du XIIIe siècle, quand n’importe que prétexte s’avère
« nécessaire » pour stigmatiser quelqu’un afin de mieux s’en
débarrasser ? Les mots nous manquent pour décrire l’opération de
communication et de diversion du gouvernement concernant le contrôle renforcé
des chômeurs, qui nous rappelle jusqu’où peut se nicher la philosophie
dominante, empreinte des pires oripeaux du néo-conservatisme des dernières
décennies. En dévoilant, hier, un véritable arsenal rénové de sanctions contre
les sans-emploi ne « remplissant pas leurs obligations », qui s’inspire
très largement des dispositifs déjà mis en œuvre en Grande-Bretagne, par
exemple, l’exécutif montre du doigt les plus faibles, s’attaque à eux sans
vergogne et transforme des victimes en coupables, ni plus ni moins. Le message
ainsi délivré à la France entière a quelque chose de répugnant. Que doit-on
entendre, sinon « salauds de chômeurs », comme certains disaient,
bien des années en arrière, « salauds de pauvres » ?
Qu’on
se rassure, la ministre Muriel Pénicaud parle de contrôles « bienveillants »
pour éviter qu’ « une minorité profite du système ». Le procédé est scandaleux.
Au moins pour deux raisons. Primo : en réalité, seuls 41,8% des chômeurs
sont indemnisés sur les 6,6 millions d’inscrits,
sans compter les quelque 2 millions de citoyens qui n’entrent pas dans les
statistiques (jeunes, autoentrepreneurs en difficulté, etc.) Secundo : la
fraude en question est si marginale que, selon Pôle emploi, elle ne représente
que 0,4% des cas…Pourtant, le gouvernement décide de tripler les équipes de
flicage, qui devraient passer de 200 à 600 agents. Juste une suggestion en passant.
Selon la Cour des comptes elle-même, la fraude aux cotisations sociales des
patrons français a explosé en dix ans et représente désormais un manque à
gagner de près de 25 milliards d’euros par an. Ajoutons à cette somme
rondelette les 60 à 80 milliards de fraude fiscale annuelle. Et vous aurez
compris la nature de la guerre de classe poursuivie par Emmanuel Macron et son
gouvernement.
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