« Bataille culturelle », l’éditorial de Jean-Emmanuel Ducoin dans l’Humanité de ce jour !
Sans surprise, Emmanuel Macron a donc répliqué à sa manière
aux grandes manifestations du 22 mars pour la défense des services publics,
expliquant, lors d’n déplacement à Bruxelles, que les mouvements sociaux n’avaient
pas d’ « impact » sur les « réformes en cours ». Beaucoup
diront qu’ « il est dans son rôle » ; d’autres qu’il montre une « évidente
arrogance » à balayer si vite ce qui, pour lui, devient un problème majeur.
Officiellement, l’exécutif « reste attentif à un mouvement de contagion »,
si l’on en croit un conseiller de l’Élysée. Officieusement, tout est mis en œuvre pour éviter une « convergence des luttes ».
Raison pour laquelle l’opinion est travaillée au moral, quitte à opposer les
usagers aux citoyens – tiens, ce ne sont pas les mêmes ? – et à expliquer,
ou à faire expliquer par une cohorte d’ « experts » en tout genre qui
trustent les médias, que les grèves et les manifestations à venir sont
évidemment vouées à l’échec, et que, bien sûr, « 2018 n’est pas 1995 »
et encore moins un certain « mois de mai »…comme s’il s’agissait de
comparer ce qui ne saurait l’être !
À la vérité, il est impossible de prédire avec exactitude
ce qui se produira dans les semaines à venir, à la SNCF comme ailleurs. Ce que
nous savons, en revanche, c’est que le matraquage idéologique va se poursuivre
massivement, jusqu’à l’énumération sans fin de contrevérités, à savoir que la « modernité »
et le « changement » seraient du côté des gouvernants et des patrons,
et que « l’archaïsme » et « l’inertie » se trouveraient du
côté du peuple, des syndicats et même des intellectuels critiques…Invitons
néanmoins les commentateurs zélés de la propagande ordinaire à la prudence. Car
les raisons ne manquent pas de croire que quelque chose d’important peut se
profiler. La conscience de l’enjeu – colossal pour l’à – venir – en est le
ressort essentiel. D’autant qu’il s’agit d’une bataille culturelle autant que
sociale : celle des services publics. La bataille s’annonce longue,
certes. Mais elle doit être l’occasion d’un large et vrai débat qui
déconstruise point par point les arguments fallacieux du gouvernement et du
patronat. Ce qui se joue, c’est la destruction par la noblesse d’État de notre « civilisation »
sociale, comme le disait Pierre Bourdieu…en 1995.
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