« Rouge de colère », l’éditorial de Maud Vergnol dans l’Humanité de ce jour !
C’est
le caractère imprévisible des commencements qui fait le politique. Nous y
sommes. Qui aurait pu prévoir il y a quinze jours qu’un coup de gueule à la
pompe réussirait à faire redescendre Jupiter sur terre et à replacer la
question sociale au centre du jeu politique ? La chute est brutale pour le
pouvoir macroniste, proportionnelle à la violence infligée aux classes
populaires depuis le début du quinquennat. Les travailleurs pauvres, les
chômeurs de longue durée, les galériens de l’ubérisation, les classes moyennes
déclassées, tous les humiliés par le mépris des puissants sortent de l’invisibilité
en jaune fluo.
La « star-up
nation » voulait les réduire au silence de la servitude volontaire. Ils envahissent
les rues pour dire stop. Une question de survie. Bien qu’inclassable et composite,
et donc imprévisible, ce mouvement ne peut laisser indifférent, ceux qui ont la
justice sociale au cœur, au risque de le pousser dans les bras de l’extrême
droite, dont le gouvernement assure opportunément la promotion permanente. Les rendez-vous
parisiens de samedi, où pourraient s’additionner les colères isolées et les
revendications collectives, seront décisifs pour la suite. Celles envoyées hier
à la presse et aux députés démontrent qu’il ne s’agit pas d’une simple « jacquerie »,
ou autre « ligue factieuse ».
Augmentation
des salaires, services publics, répartition des richesses, retraites,
démocratie…les cahiers de doléances s’inscrivent à l’encre rouge, témoignant d’une
politisation bien plus forte que présumée. Pourtant celle-ci échappe jusqu’à
présent aux structures collectives, ce qui en fait sa force, mais aussi sa
fragilité. Car les gilets jaunes sont également le produit d’un macronisme qui
s’est acharné à dépolitiser le débat public, confisqué par une poignée de
technocrates, à délégitimer partis et syndicats, à nier les clivages de classe.
Un boomerang qu’il se prend aujourd’hui en pleine figure, et qui pourrait
ébranler sévèrement la suite du quinquennat.
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire