" Le temps venu ", l'éditorial de Michel Guilloux dans l'Humanité de ce jour !
« Il faut du temps pour
passer du possible au pensable », disait la grande anthropologue Françoise
Héritier. Dans le grand mouvement d’émancipation humaine débuté au XIXe
et XXe siècles, les femmes en sont autant les actrices que l’indice
de progrès. Si l’on veut mesurer le degré d’obscurantisme auquel elles se
heurtent ou suscitent, il suffit de lire, ce début de semaine, « l’hallucinante »
interview accordée au Figaro Vox par le ci-devant Alain Finkielkraut. La campagne
Balance ton porc sur les réseaux sociaux avait, selon ce monsieur, parmi ses « objectifs »,
celui « de noyer le poisson de l’islam » et serait « une
extension hallucinante du domaine du harcèlement ». Misogynie, racisme et
mentalité réac font toujours bon ménage. Eh bien, le nouveau, ce ne sont pas
ces propos de caniveau.
La libération de la parole depuis
« l’affaire Weinstein » ne ressort pas de l’appel à la délation,
comme sous Vichy, mais de la décision de millions de femmes de par le monde de
considérer que le temps est enfin venu. Un moment salutaire de rupture s’opère
sous nos yeux, des États-Unis à la Norvège, du Mexique à la France. Face à l’obscénité
de ceux qui, volontairement ou pas, mettent sur le même pied victimes et
bourreaux, rappelons qu’à peine une femme violée ou gravement battue sur dix
ose aller en justice, chez nous. Et que notre droit permet encore à des
violeurs de fillettes de 11 ans d’arguer de leur « consentement ».
Le terreau du travail retentit
autant des violences domestiques qu’il entretient des comportements de violence
et de harcèlement. Emmanuel Macron, qui a qui a supprimé le ministère des
Droits des femmes, a l’occasion ces semaines-ci de passer à l’acte sur ces
sujets. Va-t-il entendre la Confédération syndicale internationale et ses
membres français, CGT, FO, CFDT et CFTC, qui, d’une seule voix, soutiennent un
contenu progressiste et contraignant pour les entreprises de la future norme de
l’Organisation Internationale du Travail concernant « les violences contre
les femmes et les hommes dans le monde du travail » ? Cela irait à l’encontre
de sa casse en cours du Code du travail ? Laissons-lui cette contradiction.
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire