Faire front ensemble. Les semailles du changement ! (Robert Clément)
C’est aujourd'hui son anniversaire. Un an qu’il est à l’Élysée. Pour celles et ceux qui l’ont zappé, les médias à la solde de Macron nous vantent les « qualités du roi ». Pour faire bonne mesure nous avons eu droit à un reportage des plus élogieux sur la « 3 ». Pour ma part je ne n’ai pas fait partie de ces téléspectateurs prêts à se pâmer devant « Sa majesté ». Je note d’ailleurs qu’ils sont de moins en moins nombreux à être éblouis par sa pensée complexe, et c’est tant mieux.
Pour fêter l’événement, le Président de la République a accordé un long entretien à la Nouvelle Revue Française, à paraître dans son édition de ce mois de mai. Emmanuel Macron y évoque son rapport à la littérature et l’aspect « romanesque » de la vie politique. « Les Français sont malheureux quand la politique se réduit au technique, voire politicarde. Ils aiment qu’il y a ait une histoire. J’en suis la preuve vivante ! Je suis très lucide sur le fait que ce sont les français et eux seuls qui m’ont fait, et non un parti politique, avance celui qui se définit lui-même comme une « aberration ». Je dirais, pour ma part, qu’il est surtout l’homme de « l’effraction ». Macron est le président le moins bien élu de notre histoire récente, si l’on mesure l’étroitesse de son socle électoral du premier tour de la présidentielle et l’ampleur de la défiance qu’exprime le niveau record d’abstention lors du second tour des législatives.
Mais revenons « à la figure romanesque » qu’évoque Emmanuel Macron. À quel personnage romanesque pourrait-il ressembler. Il avait annoncé sa volonté d’une présidence « Jupitérienne ». Alors Napoléon, quel roi ? Je prends au sérieux ce qu’il avait déclaré dans un entretien donné à un magazine en 2015 : « Je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort « du roi ». Plus clairement, il n’a pas fait le deuil d’une représentation monarchique. Tous les actes produits depuis un an sont là pour le prouver.
Passée la phase d’installation dominée par quelques belles mises en scène apparaît un président narcissique et autoritaire. Ou pour le dire autrement, un glissement vers l’exercice solitaire du pouvoir. Visiblement, il se fait plaisir. Il est le prince-président en son royaume. Au point de ne jamais renoncer à un bon mot, qui devient vite une provocation. Inscrivons dans ce registre la dénonciation des « fainéants » ou des « envieux » (à la presse allemande) et surtout la proclamation selon laquelle la France serait « irréformable ». Il lui faudrait donc un sauveur suprême, seul capable de la « transformer ». Je ne minimise pas son mépris pour les couches populaires et les salariés désignant par le mot « bordel » le mouvement de lutte des travailleurs victimes de licenciements. Pas plus que ses mots sur « Ceux qui ne sont rien » ou sur « les illettrées ».
Bavures verbales, formulations vulgaires ou excessives, coups de sang…Non, ce qui s’exprime dans ces formulations vient de bien plus loin que de lui : sa nature profonde, c’est tout simplement le mépris de classe qu’éprouvent les adorateurs du capital pour ceux qui n’ont qu’un bien à vendre : leur force de travail. Les formules de Macron, dit la morgue des dominants à l’égard les dominés, le mépris des « riches à l’encontre des « pauvres ». Cela souligne le danger auquel est confrontée la France d’aujourd’hui avec ce président qui n’aime que lui-même.
L’un de ses leitmotivs, répété à l’envie, c’est que lui, à la différence de ses prédécesseurs, il fait ce qu’il a dit. Il devait suivre une politique « et de gauche et de droite ». Mais c’est au pas de charge qu’il met en œuvre une politique « et de droite et de droite ». Suppression de l’ISF, baisse de l’imposition sur les revenus du capital, abolition de « l’exit-taxe », casse du Code du travail, privatisation de la SNCF et remise en cause du statut des cheminots. Il reprend à son compte tous les credo du Medef. Baisse des charges, flexibilité du marché du travail, réduction du déficit budgétaire, suppression massive des emplois de fonctionnaires.
Des milliards d’euros pour les riches, des salarié-e-s, des retraité-e-s, des jeunes, des étudiants laissés pour compte et saignés à blanc. C’est une évidence Macron a choisi de jouer la carte d’une droite décomplexée, libérale et autoritaire. D’ailleurs, une majorité d’électrices et d’électeurs de LR disent se reconnaître dans sa politique. Macron s’inspirerait-il de cette fameuse réplique d’André Malraux ? : « Entre les communistes et nous, il n’y a rien », en remplaçant « communistes » par « France Insoumise » ? En espérant dans une situation confortable, écarter du pouvoir, pendant longtemps, les forces de gauche et de transformation sociale.
Mais c’est sans compter sans la colère sociale qui se manifeste en ce printemps 2018. Le camouflet infligé au président d’Air France et au premier ministre avec le résultat du référendum ne peut que conforter les cheminots, les agents hospitaliers et des Ehpad, ceux de la fonction publique, plus largement, les salarié-e-s qui dans leurs entreprises agissent avec leurs syndicats pour leurs salaires et leur emploi, mais aussi les lycéens et les étudiants qui exigent le retrait de la loi ORE. C’est sans compter sans la voie unitaire de ces mobilisations qui tente de se frayer un chemin, particulièrement avec un « 26 mai historique ».
L’urgence c’est de rassembler largement pour faire reculer Macron et son gouvernement, pour gagner tout ce qui peut l’être, pour nourrir toutes ces mobilisations et ré-ouvrir une espérance, avec la construction d’une plate-forme, de propositions alternatives – appelons çà comme on voudra – à toutes les forces progressistes et de transformation sociale. Pas pour refaire ce qui a échoué, mais pour défricher, confronter les points de vue, inventer et ouvrir, dans les conditions d’aujourd’hui, un nouveau chemin à des solutions convergentes. En forme de réponse au président des riches, qui nous dit en substance, qu’il n’y a pas d’alternative raisonnable à sa politique, nos concitoyens, expriment leur aspiration à l’union au rassemblement pour faire front ensemble. Cela se sent, cela se voit.
À gauche, les formations politiques et écologistes doivent entendre et répondre à ce message. Qu’elles mettent à la disposition des salarié-e-s en lutte, des syndicalistes, des acteurs de la vie associative, rencontres et débats pour travailler à des solutions cohérentes et constructives. Les communistes en seront. Dans le respect de chacune des formations. Sans remplacer l’hégémonie d’hier par une autre. Il y a du grain à moudre. Il ne peut y avoir, à mon sens, de politique d’égalité, de justice et de solidarité si on ne s’attaque pas résolument à la domination du capital.
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