Prélèvement à la source : " L'Etat se fait le maximum de trésorerie sur le dos des salarié-e-s et des retraité-e-s ! (Robert Clément)
Depuis
mercredi, nous pouvons remplir en ligne, notre déclaration d’impôts pour
l’année 2018. J’y suis donc allé. J’ai pris connaissance du taux qui
s’appliquera sur mes revenus, avec la mise en place du prélèvement à la source
à compter du 1er janvier 2019. Le ministère du budget et les médias
dépensent une considérable énergie pour vous en expliquer « la mécanique ».
On vous dit que l’impôt n’augmentera pas. Ce qui est vrai, à revenus
comparables. On rassure les chefs d’entreprise, inquiets. On nous dit que sa
mise en place coûtera moins cher que prévu.
Mais
on est beaucoup moins disert sur une disposition que l’immense majorité de nos
concitoyens n’ont pas encore perçue. Qu’elles, qu’ils, vont découvrir avec le
taux qui leur est communiqué, mais plus sûrement lorsqu’ils prendront
connaissance de leur bulletin de paie ou de leur retraite, à la fin du mois de
janvier prochain.
Et,
oh, stupeur ! On va prendre l’impôt maximum sur les salaires et les
retraites afin que le prélèvement soit le plus haut possible. Je m’explique, en
m’efforçant de ne pas tomber dans la technique financière. Ce qui n’est pas
aisé. En un mot, « LE PRÉSIDENT ET
LE GOUVERNEMENT DES RICHES » PROFITENT DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE POUR SE
FAIRE UN MAXIMUM DE TRÉSORERIE EN AVANCE, MÊME SI LA FISCALITÉ FINALE NE CHANGE
PAS. TOUT SERA RÉGULARISÉ EN SEPTEMBRE DE CHAQUE ANNÉE. IL SE BASE SUR L’IMPÔT AVANT LES
RÉDUCTIONS/CRÉDITS D’IMPÔTS POUR CALCULER LE TAUX PERSONNALISÉ À LA SOURCE. La
communication gouvernementale fait son œuvre sous le titre : « Maintien
des réductions et crédits d’impôt »… Mais il faut lire jusqu’au bout ….ET
SERONT VERSÉS INTÉGRALEMENT AU MOMENT DU SOLDE D’IMPÔT À LA FIN DE L’ÉTÉ 2019. On agite les
possibilités de choix, neutre ou individualisé. Mais cela ne change strictement
rien à l’affaire. Les mêmes questions demeurent.
Prenons
deux exemples :
Lors
de sa déclaration faite en avril-mai
2018 sur les revenus de 2017, madame X, déclare 25000 euros de salaire
perçus en 2017 (moins de 2000 euros mensuels). Son impôt sera de 1777 €. Le
fisc va donc établir que le taux moyen d’imposition de madame X est de
« 1777 / 25000 » soit 7,1. À partir de janvier 2019, madame X verra
son salaire amputé de 7,1% chaque mois au titre du prélèvement à la source.
Le couple Y de retraités déclare 42000 euros sur leurs revenus 2017 (3600 euros pour le couple). Leur impôt s’élèvera à 3270 euros. Le fisc établira un taux de 7,8, pour deux parts et demi. À partir de janvier 2019 ce couple verra leurs revenus amputés de 7,8% chaque mois.
Je
reviens à mes deux exemples :
Madame
X, reçoit 25000 euros de salaires et à le droit à une réduction d’impôt de 1600
€ (Nourrice, cotisations, dons divers)
· L’impôt calculé pour 2018 est de 1777 €
· On retire la réduction d’impôt de 1600 €
· L’impôt à payer est de 177 €
Le
couple Y a 42000 € de revenus (deux retraites). Monsieur est en résidence pour
personnes âgées (coût annuel 28000 euros). Cela lui donne droit à la réduction
d’impôt (25% plafonnés à 10 000 €) soit 2500 €. Par ailleurs ce couple
bénéficie de 600 € de crédits d’impôts (dons
et cotisations).
· L’impôt calculé pour 2018 est de 3270 €
· On retire les réductions d’impôts 3100 € (2500 +600 €)
· L’impôt à payer est de 170 €
Tout
le monde l’aura compris, le gouvernement ne va pas retenir l’impôt que nous
payons réellement pour établir le prélèvement à la source. Il se base sur
l’impôt calculé avant les réductions /crédits d’impôts. Ce qui lui permet
d’obtenir un pourcentage plus élevé qui sera retenu sur les salaires et les
retraites. La différence est énorme.
Le
prélèvement à la source de madame X
s’élèvera, à partir de janvier 2019, avec un taux à 7,1, à 148 €, soit 131
€ de plus que ce qu’elle paie aujourd’hui. Il faudra donc qu’elle attende l’été
2019 pour obtenir la régularisation de sa situation et bénéficier de ses 1600
euros de réduction d’impôt. Si le fisc avait retenu l’impôt réel son taux n’aurait
pas été de 7,1% mais de 0,01%
Il en
est de même pour le couple Y, avec un taux de 7,8% l’impôt mensuel s’élèvera à
271 €, soit 216 € de plus que ce ménage paie aujourd’hui. C’est à la fin de
l’été 2019 que ce couple verra une régularisation avec un remboursement de 3100
€. Si le fisc avait retenu l’impôt réel le taux n’aurait pas été de 7,8 mais
0,01.
Le
président Jupiter ne manque décidément pas d’aplomb, lorsque depuis une école
de l’Orne, « il remercie mille fois les retraité-e-s » et ose dire « qu’il
n’a jamais pris un retraité pour un portefeuille » Après l’augmentation de
la CSG, y compris pour les personnes séjournant en maison de retraite, voilà
qu’il renvoie à septembre 2019 le remboursement du crédit d’impôt auquel ont
droit les personnes se trouvant en établissements. Quelle arrogance et quel
mépris !
Voilà
donc l’équation. Des millions de familles, de femmes seules, de retraité-e-s
vont se retrouver dans une situation que l’on peut qualifier d’ingérable
jusqu’en août 2019. Avec quels moyens, peuvent-elles, peuvent-ils faire de
telles avances de trésorerie à l’État. Comment payer son loyer, ses charges, se
nourrir, se vêtir durant ces longs mois. J’ai du mal à imaginer, dans une
période de dégradation du pouvoir
d’achat, la situation dramatique dans laquelle vont se trouver des familles, des
retraité-e-s, qui vont voir leurs salaires ou leurs retraites amputés de 100,
200, voire 300 € et qui leur seront
rendus 8 mois plus tard. Devront-ils emprunter, être à découvert et payer les
agios à leur banquier, qui ne leur fera aucun cadeau ? Énarques,
technocrates du monde de la finance, en service commandé pour Macron et
Philippe, les auteurs de ce projet, ne connaissent rien de la vie des simples
gens. Ils ne sont pas payés pour çà.
On
agite les possibilités de choix, neutre ou individualisé. Mais cela ne change
strictement rien à l’affaire. Les mêmes questions demeurent. Nous pouvons
d’ailleurs nous demander si cette masse énorme de trésorerie ne va pas se
transformer en placements financiers pour alimenter, une fois de plus, les
intérêts privés. J’ajoute une autre réflexion. Les cotisations aux syndicats et
aux partis politiques, les dons aux associations caritatives subiront le même
sort. Il y a des craintes à avoir sur leur pérennité dans un moment où le
pouvoir d’achat va se trouver durement écorné.
Nul
doute que l’État aurait parfaitement pu retenir l’impôt final pour le calcul du
taux de prélèvement à la source et faire le schéma inverse : réclamer le
surplus d’impôt en septembre suivant si le contribuable n’a pas renouvelé sa
réduction d’impôt. À priori on a préféré prendre un maximum aux Françaises et
aux Français quitte à devoir régulariser la majorité des avis d’imposition
chaque année en septembre. Mais a-t-on une idée des drames que peut engendrer
une telle situation pour ces « privilégiés », ces moins que
rien », ces « illettrées ». Je ne me fais pas de « mouron »
pour les plus aisés des contribuables, qui bénéficient de multiples réductions
d’impôts. Eux peuvent attendre quelques mois, ils ont des comptes en banque
bien fournis.
Au
fond, s’il fallait retenir un aspect positif du prélèvement à la source, ce serait
pour les chômeurs qui se sont trouvés en grande difficulté pour payer l’impôt
qui était calculé sur leur salaire de l’année précédente. Il en est de même
lors du départ à la retraite avec la baisse des revenus correspondants. Mais
au-delà de ces situations, l’intérêt d’une telle réforme paraît bien mince. Le
prélèvement mensuel adopté par 7 Français sur 10 répondait au problème du
décalage dans le temps de l’impôt sur le revenu. J’en suis à me demander si
cette réforme ne va pas servir à rendre moins visible une augmentation de
l’impôt et de faire payer plus d’impôts aux ménages modestes et moyens, qui
déjà n’en peuvent plus. Une vraie réforme aurait été celle d’un impôt rénové,
réellement progressif, prenant en compte la capacité contributive de chacun.
Pour l’heure le temps presse. Une décision devrait être prise afin que des millions de salarié-e-s et de retraité-e-s ne connaissent pas la galère, pendant 8 mois. Intervenons, mobilisons-nous, partageons l’information. Exigeons de Macron et du gouvernement qu’ils revoient leur copie. Il y a urgence !
Robert Clément
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