« ÉTÉ DE BRAISES… », L’ÉDITORIAL DE PATRICK LE HYARIC !
L’été est
toujours là qui s’étire sous d’ardents rayons de soleil. Il va nous accompagner
durant les jours qui nous séparent de la fête de L’Humanité. Ce soleil de feu,
« fabricant » de canicule, y sera comme depuis des mois l’un des
sujets alimentant conversations et débats.
Pendant
qu’une chaleur estivale inédite s’abattait, nos concitoyens auront vibré aux
exploits de jeunes coureurs français du Tour de France, après avoir joyeusement
soutenu l’équipe féminine de football. Julian Alaphilippe et Thibault Pineau
leur ont rendu comme une fierté, comme en d’autres temps Jean Robic, Louison
Bobet, Jacques Anquetil, Raymond Poulidor ou Bernard Hinault. Appelons ça le
goût de l’audace et du dépassement. Sans oublier la célébration des exploits du
jeune Colombien Egan Bernal, témoignant d’un fraternel sentiment
internationaliste.
Loin, à
l’opposé même, des propos belliqueux ressassés par Trump qui a profité de l’été
pour accélérer la guerre économique au nom et au service du national
capitalisme nord-Américain soutenu par une folle course aux armements menée
partout, jusque dans l’espace.
Pendant ce
temps, un ministre a été contraint à la démission après s’être pris les doigts
dans les pinces d’un homard. Ses supérieurs, à commencer par le chef de l’Etat,
ne tenaient pas à affronter un second été feuillet$onné par un scandale, à
l’image de celui déclenché par un dénommé Alexandre Benalla.
C’est
cependant une autre affaire autrement plus dramatique qui aura marqué et
endeuillé notre été : celle qui a conduit le jeune Steve dans l’eau glacée
de la Loire. Le débat sur le « maintien de l’ordre » en lieu et place
de la sécurité publique est posé avec d’autant plus de force qu’il n’est
désormais plus possible d’ignorer les violences policières, leur caractère trop
souvent systématique et leur cortège de sévices. La conjugaison des
déploiements policiers, des restrictions de liberté et de l’affaissement
démocratique sert à protéger non pas les citoyens, comme tentent benoîtement de
le faire croire nos dirigeants, mais les politiques antisociales.
Ce n’est pas
du tout là un signe de force. La décapitation des droits sociaux et humains à
l’arme lourde élargit le front de celles et de ceux qui contestent, non plus seulement
les pouvoirs en place, mais le système. Le doute et les craintes grandissent
jusque dans les milieux de la haute finance. N’est-il pas symptomatique que, du
G7 à l’université du Medef, sans oublier les propos du Président de la
République à l’assemblée de l’Organisation internationale du travail, les
craintes face à la colère du peuple s’expriment au grand jour, tandis que la
presse économique s’émeut de la probabilité d’une sévère récession ?
Evidemment,
il s’agit toujours d’alerter les milieux d’affaires sur les risques qu’une
nouvelle révolte populaire leur ferait encourir. Davantage, c’est la crainte
qu’elle ne se transforme en force jetant les bases de l’invention d’un
« post-capitalisme ». Les inégalités et les balafres faites aux êtres
humains et aux territoires, le saccage et l’épuisement de la nature, s’invitent
à toutes les tables des Conseils d’administration telles des sirènes hurlantes.
Leur obsession est de trouver le moyen de rendre tout ceci acceptable et
accepté par les victimes, sans remettre en cause leurs intérêts et leur
domination. La nôtre est d’engager une bifurcation pour une politique de
civilisation. Elle est d’engager un processus unitaire de mobilisation pour
qu’enfin l’être humain et l’humanité, la mise en commun deviennent les critères
de tout choix.
C’est le cœur
de ce qui se discutera lors de la fête de L’Humanité, avec un enjeu qui dépasse
désormais largement les forces militantes les plus engagées pour concerner la
majorité des travailleurs, des jeunes comme des retraités. N’est-ce pas du
reste ce qui s’est exprimé ces dernières semaines dans les luttes pour la
justice, l’emploi, les services publics et les outils industriels, la
démocratie ? Nous pensons aux gilets jaunes, aux salariés d’Arjowiggins,
d’Ascoval, d’Alstom, de Conforama, aux travailleurs de Deliveroo, aux
urgentistes, aux enseignants et bien d’autres encore. Sans oublier la
signification des manifestations de paysans contre le traité de libre-échange
avec Le Canada (Ceta) alors que se fomentait celui avec des pays d’Amérique
Latine (Mercosur).
Ces traités
sont devenus les marqueurs de ce système de la « concurrence libre »
et… tout à fait faussée qui contribue à chambouler le climat, détruire la
nature, nos usines, nos fermes et menacer la santé. Mais la réalité est là,
évidente, angoissante : les rivières sont à sec, les champs grillés, fonte des
glaciers, les feux de forêt ou les orages violents se succèdent alors que les
nuits sont si chaudes, si étouffantes dans le béton de villes qui deviennent
invivables.
Ces jours
derniers, c’est L’ONU qui a montré que les modifications climatiques vont
provoquer un déplacement de populations des pays du Sud d’une part équivalente
à cinq fois la population française. Ce n’est donc pas en rejetant à la mer le
réfugié d’aujourd’hui et de demain qu’on construit un monde commun.
Total respect
à celles et ceux qui organisent des brigades pour chasser les détritus et
particulièrement le plastique qui termine dans le ventre des poissons comme au
maire de Langouet qui a eu le courage de défier de piètres autorités publiques
qui osent les pourchasser pour avoir protégé la population et les enfants des
épandages d’herbicides. La meilleure réponse consisterait sans doute en un
mouvement des maires produisant des arrêtés similaires sur tout le territoire.
De la même manière, combattre les méga-feux de forêt au Brésil et ailleurs
devrait conduire à mener ici, avec constance et détermination, un combat pour
obtenir un plan-protéine européen nous permettant d’être indépendants des
importations de soja et de manioc. C’est parce que ce débouché est ouvert que
les grands propriétaires terriens s’accaparent des terres pour ces cultures
d’exportation favorisées, encouragées donc, par les traités de
« libre-échange ». Là-bas, c’est toujours plus de paysans sans terres
et ici toujours plus de funestes « fermes-industrielles » alimentées
par ces importations aux coté de déserts ruraux et de fractures territoriales.
C’est d’une
autre cohérence dont a besoin le monde, l’humanité souffrante et menacée. Cela
se joue dans de nombreux combats pour le bien commun et la maîtrise publique,
sociale, démocratique. Le pouvoir y met du charbon avec la privatisation
d’Aéroports de Paris, d’Engie ou de La Française des jeux, comme avec le projet
de contre-réforme des retraites.
Ainsi, la
campagne unitaire pour obtenir un référendum sur la propriété d’Aéroport de
Paris permet de rouvrir le débat sur la propriété des moyens de production et
d’échanges comme sur les biens communs. L’action unie pour l’amélioration du
système des retraites solidaires par répartition face au scélérat projet
gouvernemental visant à individualiser des droits amaigris, qui répondrait aux
appétits des assurances privées, est un enjeu de civilisation et
anticapitaliste de haute importance. De même, l’offensive du grand patronat,
des droites et du pouvoir, pour réduire les « dépenses publiques »
doit être combattue avec acharnement à la veille de la préparation du budget de
la nation. Derrière ces mots, c’est l’hôpital du coin qui est menacé, la poste,
le commissariat ou la perception fermée, l’école amputée, la file d’attente qui
s’allonge le samedi matin à la poste quand elle n’est pas fermée, la voie
ferrée ou le pont non entretenu, devenus dangereux, la commune asphyxiée.
Au soir de
cet été de braises, les débats doivent être favorisés. La fête de l’Humanité
peut leur donner une nouvelle ampleur. Argumentés, ouverts, ils peuvent
contribuer à des mobilisations, à de nouvelles réflexions pour aider les
classes populaires à sortir de l’abstention, mais aussi à s’organiser afin
d’orienter le désir de changements vers le progressisme et non sur la pente de
la régression. La vulgarité, la violence antisociale, antihumaniste,
anti-écologique et belliciste des Trump, Johnson, Erdogan, Salvini, Bolsonaro,
Netanyahou, doivent faire réfléchir. Leur capacité à tromper ceux qui souffrent
le plus aussi.
Quel plus bel
endroit pour débattre et s’organiser, pour sortir de l’été de braises et
défricher de nouveaux chemins d’humanité, que la fête de L’Humanité. Il reste
quelques jours pour en élargir encore la participation.
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