LE BLOG DES COMMUNISTES DE ROMAINVILLE

mardi 26 février 2019

« LE CRI D’ALGER », L’EDITORIAL DE MAURICE ULRICH DANS L’HUMANITE DE DEMAIN MERCREDI


« Djoumhouria, machi mamelaka ! » ont scandé hier des centaines d’étudiants sur les hauteurs d’Alger, des milliers dans le pays. « Une République, pas une monarchie ! » À ce ­slogan qui exprime le rejet de la cinquième candidature d’Abdelaziz Bouteflika, s’en ajoute souvent un autre. « Que les harraga reposent en paix. » Il s’agit de ces jeunes qui, après avoir brûlé leurs papiers, tentent la traversée de la Méditerranée devenue le cimetière marin que l’on sait. La crise en Algérie couvait depuis plusieurs années. Elle éclate avec deux dimensions qui se conjuguent. Elle est sociale et morale. Sociale car, depuis cinq ans, la chute du cours des hydrocarbures, qui représentent 94 % des exportations du pays, a amené une chute sans précédent du pouvoir d’achat. Le pays, en dépit de la corruption des cercles dirigeants, connaissait, grâce à une politique pour partie redistributive, une relative paix sociale aujourd’hui rompue. L’autre dimension est une crise de dignité et de démocratie. Depuis sept ans le pays est dirigé par un président fantôme qui n’apparaît plus jamais en public et qui est devenu muet. C’est une forme d’humiliation.
Pour les nouvelles générations, la fin de la décennie noire, pendant laquelle les islamistes ont tué de 100 000 à 200 000 personnes, est déjà loin, et si le Président actuel s’est prévalu d’y être pour quelque chose, cela ne justifie en rien la situation d’aujourd’hui. Sans doute à ses côtés tente-t-on d’agiter le danger du ­retour à ces années mais les jeunes Algériens, dont les manifestations sont exemplairement pacifiques, ont besoin de démocratie et de progrès social. L’aggravation de la crise, ce serait l’obstination de l’équipe dirigeante. Sa volonté de tenir les médias à distance, y compris en refusant leur visa à des journalistes, n’augure rien de bon. Sa résolution, c’est une transition démocratique qui peut être sereine. La France dans ces conditions n’a qu’une chose à faire : rien. Rien qui puisse tendre la situation au prétexte du maintien d’un ordre qui est le véritable désordre.

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