« LAISSONS LA PAIX AU VENEZUELA », L’EDITORIAL DE GAËL DE SANTIS DANS L’HUMANITE DE DEMAIN VENDREDI
Quand un président des États-Unis entend projeter dans un pays son armada,
il habille ses desseins hégémoniques d’une noble cause. Il en a toujours été
ainsi, comme on l’a vu par le passé. Au Panama, il fallait dégager un
« tyran » pour faire main basse sur le canal. En Irak, les prétendues
armes de destruction massive ont été un grossier prétexte pour s’accaparer le
pétrole. Donald Trump tient son motif de guerre pour intervenir au Venezuela,
après avoir porté aux nues un illustre inconnu, Juan Guaido, qui s’est
autoproclamé, le 23 janvier, chef de l’État par intérim.
Le casus belli, nous dit-on, serait la situation humanitaire et non les
importantes réserves pétrolières. Insensible au sort des Haïtiens mobilisés
contre leurs conditions de vie déplorables, le locataire de la Maison-Blanche,
qui exige d’ériger un mur à ses frontières, a fait acheminer aux confins du
Venezuela des colis d’aide alimentaire et médicale. Des miettes comparées aux
sanctions imposées par Washington, qui a gelé dernièrement 7 milliards de
dollars d’avoir de la compagnie PDVSA. La communication a été bien
ficelée : les volontaires de Guaido se posteront, samedi, à la frontière
de la Colombie pour récupérer le « sésame », au risque de heurts avec
l’armée vénézuélienne, loyale au président réélu en mai 2018, Nicolas Maduro.
Cette opération est très politique. Au point que la Croix-Rouge a refusé de se
mêler à ce jeu, estimant que si une aide humanitaire doit être acheminée, elle
doit l’être avec l’aval des autorités légales du pays.
Le Venezuela a besoin de solidarité, certainement pas d’un conflit aux
conséquences régionales désastreuses. Au lieu de souffler sur les braises, les
dirigeants européens feraient bien d’adopter une attitude responsable, en
appuyant les fragiles médiations afin que Juan Guaido accepte enfin de
s’asseoir à la table des négociations. Ils pourraient même se rendre utiles, en
envisageant avec Caracas de réelles coopérations pour sortir de la dépendance
pétrolière.
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