" Irresponsabilité ", l'éditorial de Sébastien Crépel dans l'Humanité du Jeudi 19 juillet
Faut-il en rire ou s’en
désespérer ? La servilité face à leur maître des députés de la Macronie, qui
vantent, après l’avoir combattue, la possibilité offerte demain au
président-monarque d’avoir le dernier mot au Congrès face aux représentants de
la nation, montre le degré d’abaissement du Parlement auquel conduit le régime
actuel des institutions. Nul besoin d’en rajouter en permettant de piétiner
jusqu’au bout la séparation des pouvoirs. Après avoir contraint les élus à
écouter au garde-à-vous le discours du trône, l’omnipotence du chef de l’État
serait ainsi consacrée, en même temps que son irresponsabilité, puisque le
Congrès n’aurait nul moyen de le censurer. C’est ce qui se profile si la bien
nommée majorité présidentielle entraîne par son vote le Parlement tout entier à
se saborder lui-même en cédant aux désirs de l’Élysée.
Dans quelle démocratie au monde
le président de la République réunit-il le pouvoir législatif pour lui
annoncer qu’il amende de son propre chef un projet de loi constitutionnelle en
vue d’élargir ses pouvoirs ? À part, peut-être, dans la Turquie d’Erdogan, cela
n’existe pas. Et Emmanuel Macron fait mine de s’étonner du reproche qu’on lui
ferait de « respecter la Constitution » en convoquant le Parlement une fois
l’an à Versailles. Qu’il n’enfreigne pas la loi fondamentale, c’est bien le
moins ! Le problème est, bien entendu, ailleurs : il réside dans la fuite en
avant présidentialiste entamée avec la Constitution de 1958, et poursuivie par
la réforme du quinquennat présidentiel en 2000, puis par la révision sarkozyste
votée de justesse par le Congrès, il y a dix ans.
Au moins le texte fondateur de la
Ve République avait-il été approuvé par référendum. Ce n’est pas la voie
choisie par Emmanuel Macron qui, comme Sarkozy en 2008, préfère mener des
tractations de couloir au Parlement. Comme quoi, on peut aspirer à devenir
monarque absolu et s’accommoder du « régime des partis » qu’on fustige quand il
s’agit de contourner le peuple.
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