« Chasse gardée », l’éditorial de Sébastien Crépel dans l’Humanité de ce jour !
Comme
on pouvait s’en douter, force reste à la majorité. Ce qui est le produit
légitime des urnes ne l’est plus quand cette force est détournée pour empêcher
la recherche de la vérité. Pour les députés de la République en marche, la
liberté d’enquête des parlementaires s’arrête là où commence la chasse gardée
de l’Élysée. C’est-à-dire très tôt dans la chaîne de responsabilités qui remonte
des agissements du garde du corps d’Emmanuel Macron, le 1er Mai, au
premier cercle autour du chef de l’État, voire à ce dernier lui-même.
La présidente
de la commission d’enquête, Yaël Braun-Pivet, a mis son veto : « il n’y
aura pas d’autres auditions ou études de documents. » Comment expliquer
que la députée déclare, contre l’avis de près de la moitié de la commission, le
dossier bouclé et les responsables identifiés, quelque part à un niveau
subalterne entre Alexandre Benalla et le chef adjoint d’un rayon de la
préfecture de police, pendant que ses collègues au Sénat prolongent de six mois
leurs investigations, avec le concours de tous les groupes politiques ? Et
tandis, que quasiment quotidiennement, de nouveaux éléments, comme la présence
de Benalla sur une autre scène de violence au Jardin des Plantes, montrent que
l’on est loin d’avoir fait toute la lumière sur le rôle exact de l’obscur
conseiller de la présidence.
Pendant
ce temps, ce dernier, qui n’a jamais été auditionné par le Parlement, va de
plateaux télé en journaux pour expliquer sa « vérité », à défaut de
la vérité. Une défense de luxe pour celui qui jure ne pas faire partie des
cercles « formatés’ du pouvoir…lesquels l’auront pourtant protégé comme un
des leurs de l’action de la justice. C’est cet abus de pouvoir de l’exécutif qu’entend
sanctionner la double motion de censure discutée demain – une de l’opposition
de droite et une de la gauche PS-PCF-FI. Mais elle vise aussi à restaurer la
dignité du Parlement bafoué par les relais trop zélés de l’Élysée à l’Assemblée.
Un plaidoyer pour la séparation des pouvoirs, en quelque sorte.
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