Empêcher l'étouffement de l'affaire Benalla-Macron
25/07/2018 - PCF
Notre
pays traverse une très grave crise institutionnelle et démocratique.
L’affaire Benalla est devenue officiellement une « affaire Macron » puisque le Président de la République revendique en être « le seul responsable », tout en affirmant n’avoir à en rendre compte devant aucune institution de la République, et surtout pas au Parlement. La démocratie est bafouée comme jamais. Le danger est d’autant plus grand qu’au même moment, Emmanuel Macron fait tout pour imposer une révision de la Constitution aggravant tous ses traits anti-démocratiques, même s’il vient d’en être provisoirement empêché par la suspension des travaux parlementaires sur cette révision.
Ce scandale d’État est révélateur de ce qui doit cesser au plus
vite dans notre République: l’omnipotence et l’impunité dont jouit le Président
de la République, hors de tout contrôle démocratique. Les conséquences de cette
affaire seront durables, mais elles ne sont pas jouées. L’avenir ne sera pas le
même selon que l’emportera dans l’opinion la colère, le dégoût, le discrédit de
la démocratie ou au contraire la mobilisation populaire pour exiger la transparence
et la justice jusqu’au bout dans cette affaire, l’abandon de la révision
constitutionnelle programmée par Macron et au-delà une refondation démocratique
de nos institutions jusqu’à l’avènement d’une nouvelle République fondée sur
une nouvelle Constitution.
Une bataille majeure est désormais engagée. Les parlementaires
communistes et notre parti l'avaient lancée avant même l’affaire Benalla en
prêtant leur nouveau serment du jeu de Paume le 9 juillet, quand Emmanuel
Macron est venu devant le congrès à Versailles.
Quels premiers enseignements tirer de cette affaire?
Quels premiers enseignements tirer de cette affaire?
Premièrement, l’extrême gravité des faits. Le chef de la
sécurité privée de l’Élysée, Alexandre Benalla, qui assurait déjà la garde
rapprochée du Président pendant sa campagne, a été installé à un poste clé,
cela en dehors et même à l’encontre des services de protection officielle de la
police nationale. Cet homme a été protégé et ne cessait d’intervenir en
dépassant ses fonctions. Aussi grave soit-il, le 1er mai n’a pas été un cas isolé.
Pourquoi n’y-a-t-il pas eu plus tôt des réactions? Comment cela a-t-il été
rendu possible? Parce que l’impunité présidentielle s’insinue comme un poison
dans notre vie politique et institutionnelle, et que le sésame présidentiel
s’impose au respect des règles publiques et démocratiques. Mais plus grave
encore, on sait désormais, qu’une réforme de la sécurité de l’Élysée,
actuellement assurée par un service de la police nationale et par un
commandement militaire, envisageait d’introduire la sécurité privée dans le
nouveau dispositif au plus haut niveau de l’État. Benalla n’était donc pas un
accident mais la préfiguration d’un projet de privatisation rampante de la
sécurité de l’Élysée qui marquait, comme en ont témoigné les syndicats de
policiers, une défiance à l’égard des fonctionnaires, de leur statut et de leur
mission de service public, de leur code de déontologie. Macron veut, à tous les
étages de la République, des services à sa main, et il veut tout simplement
appliquer à l’Élysée ses principes de destruction de l’appareil d’État public,
avec les recettes d’austérité et de privatisation qu’il entend infliger à toute
la société.
Deuxième enseignement, la gravité de la réaction de l’Élysée.
Celle-ci a bafoué tous les dispositifs de protection de la démocratie et des
règles publiques qui auraient dû être appliquées. L’Élysée a cherché à étouffer
l’affaire et à la mettre sous le tapis, en pleine connaissance de ce qui
s’était passé. Sans l’article du journal Le Monde, tout aurait continué comme
avant. Sans la réaction du Parlement, qui a refusé de poursuivre l’examen du
projet constitutionnel, celui-ci aurait été adopté à l’Assemblée nationale
cette semaine par une majorité de godillots En Marche. Aujourd’hui, la
stratégie d’étouffement a explosé. Deux commissions d’enquête parlementaire,
une instruction judiciaire, et une enquête de l’IGPN sont en cours. Alors que
fait le Président de la République? Il déclenche l’arme lourde : celle de la
toute puissance présidentielle dans nos institutions. « Je suis le seul
responsable et comme je n’ai de compte à rendre à personne, fermez le ban, et
on reprendra la révision constitutionnelle quand je le déciderai ». Et il lâche
cette formule incroyable, digne d’un forcené assiégé, reclus dans son château:
« qu’ils viennent me chercher! » En clair, le Président dit qu’il s’assoit sur
les procédures en cours, sur le Parlement, et qu’il décidera seul des suites à
donner à cette affaire. Et c’est là que nous touchons au fond du problème
démocratique posé à notre pays par la dérive de tout le système vers la
monarchie présidentielle absolue, négation même d’une République digne de son
ce nom.
En déclarant, comme viennent de le faire successivement Édouard Philippe et Emmanuel Macron, que le Président de la République n’a de compte à rendre qu’au peuple directement, autrement dit qu’il ne relève d’aucun contrôle démocratique entre deux élections présidentielles, ils sacralisent le fait que le quinquennat devient ainsi une période de pleins pouvoirs pour le Président de la République. Ils ont beau dire que le gouvernement, lui, rend compte devant le Parlement, c’est une duperie puisque tous les arbitrages relèvent désormais du Président de la République. Et c’est le sens profond de la révision constitutionnelle engagée: pousser à terme cette logique pour aboutir à une Présidence encore augmentée et une démocratie encore diminuée. Et pour cela, réduire d’un tiers le nombre de parlementaires ce qui les coupera davantage du peuple et permettra au passage de liquider le pluralisme politique des assemblées; réduire leur pouvoir d’amendement, leur maîtrise de l’ordre du jour parlementaire au profit du gouvernement; réduire le nombre, le rôle et la libre administration des collectivités locales; réduire de moitié le nombre de membres du Conseil économique, social et environnemental... On sait au service de quel projet Emmanuel Macron veut ce régime de pleins pouvoirs: la liquidation de l’État social pour le seul service des riches, du capital financier et du marché. Cette société dangereuse, inégale et anti-démocratique, dans laquelle l’injustice et l’autoritarisme marchent de pair, nous ne devons pas l’accepter.
En déclarant, comme viennent de le faire successivement Édouard Philippe et Emmanuel Macron, que le Président de la République n’a de compte à rendre qu’au peuple directement, autrement dit qu’il ne relève d’aucun contrôle démocratique entre deux élections présidentielles, ils sacralisent le fait que le quinquennat devient ainsi une période de pleins pouvoirs pour le Président de la République. Ils ont beau dire que le gouvernement, lui, rend compte devant le Parlement, c’est une duperie puisque tous les arbitrages relèvent désormais du Président de la République. Et c’est le sens profond de la révision constitutionnelle engagée: pousser à terme cette logique pour aboutir à une Présidence encore augmentée et une démocratie encore diminuée. Et pour cela, réduire d’un tiers le nombre de parlementaires ce qui les coupera davantage du peuple et permettra au passage de liquider le pluralisme politique des assemblées; réduire leur pouvoir d’amendement, leur maîtrise de l’ordre du jour parlementaire au profit du gouvernement; réduire le nombre, le rôle et la libre administration des collectivités locales; réduire de moitié le nombre de membres du Conseil économique, social et environnemental... On sait au service de quel projet Emmanuel Macron veut ce régime de pleins pouvoirs: la liquidation de l’État social pour le seul service des riches, du capital financier et du marché. Cette société dangereuse, inégale et anti-démocratique, dans laquelle l’injustice et l’autoritarisme marchent de pair, nous ne devons pas l’accepter.
Tirer toutes les leçons de l’affaire Macron-Benalla, c’est donc
empêcher l’étouffement de cette affaire et soutenir jusqu’au bout la
manifestation de la vérité et la mise en œuvre des sanctions et des mesures
qu’elle rendra nécessaires. C’est notamment refuser la privatisation en marche
des missions de sécurité. C’est au6delà amplifier la bataille pour l’abandon du
projet constitutionnel macronien et empêcher la reprise des débats à la rentrée
sur ces bases. C’est engager dans le pays un débat national d’ampleur pour la
désintoxication présidentialiste du régime et la démocratisation profonde de la
République. Les communistes et leurs parlementaires prendront toutes les
initiatives nécessaires en ce sens.
Pierre Laurent, secrétaire national du PCF,
Paris, le 25 juillet 2018.
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