" Coup d'Etat local ", l'éditorial de Jean-Emmanuel Ducoin dans l'Humanité de ce jour !
Loin des regards et de l’attention
des citoyens, un big-bang institutionnel et territorial se prépare en silence. Il
concerne la plus grande de nos régions, celle dite du Grand Paris, qui, selon
la formule consacrée n’est rien d’autre que « le poumon économique de la France ».
Cette zone de 131 communes dont le PIB est jalousé par certains États de l’Europe
s’apprête à vivre une contre-révolution : le pouvoir actuel, dans la
lignée de ses prédécesseurs, veut imposer ni plus ni moins que la sortie de
notre histoire républicaine à la française, comme en témoigne une note du
préfet d’Île-de-France révélée avant les fêtes qui professe la suppression de
tous les départements, donc de leur compétence. Inutile de chercher la « cohérence ».Elle
porte un unique nom : libéralisme. Et un cadre, soi-disant « libre et
non faussé » : l’Europe des régions, par lesquelles les territoires
et les métropoles s’extraient des processus citoyens en privilégiant les
logiques marchandes et la compétition économique. Résumons ; seules les
grandes régions, mises en concurrence entre elles, sortiront vivantes du champ
de bataille financier.
L’affaires est grave, mais loin d’être
achevée. Car au départ, le Grand Paris était une idée qui aurait pu déboucher
sur un projet mettant en œuvre plus d’égalité,
plus de solidarité et plus d’inclusion en tant que réponse politique aux inégalités
sociales et territoriales d’espaces urbains en profonde mutation. Le chemin
inverse semble privilégié, visant à minimiser les champs d’action des
collectivités locales pour réduire au maximum la place des services publics. À
l’étape actuelle, la métropole du Grand Paris reste une communauté d’élus et
pas celle des citoyens. Pourtant, quand on leur donne la parole, les habitants
concernés ne taisent pas leurs aspirations, qui oscillent entre espoir d’égalité
et peur du déclassement. Ils savent que l’avenir de leur territoire peut leur
échapper et se transformer en relégation territoriale…Chacun doit pouvoir juger
sur pièces et s’opposer à la vision libérale de l’aménagement du territoire,
donc de nos vies quotidiennes. Çà s’appelle la démocratie.
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