«Contre-feux ! Le nouvel épouvantail « illibéral » (Maud Vergnol)
« Illibéralisme »,
Emmanuel Macron a utilisé plusieurs fois ce terme lors de ses vœux à la presse. « Plusieurs régimes
politiques sont tentés par l’illibéralisme politique, et à chaque fois c’est
évidemment la presse qui est la première menacée », a – t – il affirmé. Pourquoi brandir soudainement ce
terme jusqu’à présent absent des discours politiques ?
Le président de la
République qui a déjà importé une série de concepts anglo-saxons dans le débat
public, connaît trop bien la valeur des mots pour l’avoir choisi sans
arrière-pensée politique. « L’illibéralisme » est en effet un concept
introduit dans les années 1990 pour désigner ces régimes démocratiques sur le
papier, parce qu’ils tirent leur légitimité d’élections réelles, mais qui
musellent la démocratie et remettent en cause les libertés individuelles.
Emmanuel
Macron désignait donc, avec ce terme, le premier ministre hongrois Viktor
Orban, ou le turc Recep Tayyip Erdogan. Alors pourquoi ne pas parler tout
simplement de dérives autoritaires ? Sans aucun doute parce que le concept
« d’illibéralisme », présente un autre avantage : discréditer
toute alternative au libéralisme économique, sur lequel est savamment entretenue
la confusion avec le libéralisme politique. Et ainsi distiller dans les esprits
que tout projet politique « post-libéral » du point de vue économique
serait suspect, forcément antidémocratique et autoritaire.
Cette instrumentalisation
politique est loin du sens que lui donne l’historien Pierre Rosanvallon, qui
définit l’illibéralisme comme « la tentation de réduire la démocratie à
une légitimation par les urnes des gouvernants, dénonçant les permanences
bonapartistes de la pratique du pouvoir. Une tentation qui n’est pas étrangère
à Emmanuel Macron.
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