Histoire de l'urbanisme : "L'indigente plaidoirie de Monsieur Champion "
Le 18 décembre dernier Monsieur
l’Adjoint au Maire chargé de l’aménagement et du patrimoine a tenté de se
mettre dans la peau d’un historien pour, dans son pensum, évoquer « les cycles
de l’urbanité de Romainville ». Ce qu’il y a d’objectif dans l’histoire,
ce sont les faits, les dates. Et c’est cette objectivité du matériel historique
que la méthode de l’historien doit garantir. C’est éviter les adjectifs, qui
sont souvent le support de clichés.
En un mot pour découvrir et transmettre la
vérité intégrale sans l’altérer en rien, il faut à l’historien, à un rare
degré, des qualités intellectuelles, morales et littéraires. Nous n’avons pas,
pour notre part, cette prétention. Nous
tenons seulement à témoigner à partir de
faits avérés, que personne ne peut détenir à lui seul la « vérité ».
Que l’histoire d’une ville, à toutes les époques, ne se résume pas à des
condamnations péremptoires et à un jugement sans appel. C’est l’objet de ce
papier.
Dans ce que Monsieur Champion
nomme le « 3ème cycle
d’urbanisation de la ville », celui-ci nous parle de « l’urbanisme
des grands ensembles, d’une piètre qualité architecturale…Il poursuit :
« À Romainville de 1957 à 1975, soit en 18 ans, on passera de 0 à 5000
logements sociaux. L’histoire, ce sont des faits, avons-nous dit. Nous y
voilà !
Voici ce qu’écrivait, ce même
monsieur Champion, dans un article publié
dans le numéro de février 2012 du magazine d’informations municipales :
SUR 4763 LOGEMENTS SOCIAUX L’OPH EN GÈRE 3450 ». 5000, en 1975, et 4763 en
2012 ????
Mais ce n’est pas tout. Après
1975, d’autres opérations immobilières ont vu le jour : les résidences des
Oseraies, Husson-République, Elsa Triolet, La cité Jacques Duclos, Pablo Néruda,
Paul Éluard, les logements en accession à la propriété aux Fontaines, Bd
Barbusse, route de Montreuil, rue de la République, rue Jean Jaurès, rue de la
Convention…Un bon milliers d’appartements. Nous sommes bien loin des chiffres
énoncés par Monsieur Champion. Citons l’INSEE, et chacun jugera :
Résidences principales en
2014, selon le type de logement (social, intermédiaire accession) et la période
d’achèvement :
Avant 1919 : 233 maisons et 183 appartements
De 1919 à 1945 : 776 maisons et 580 appartements
De 1946 à 1970 : 776 maisons
et 3448 appartements
De 1971 à 1990 : 409
maisons et 1761 appartements
De 1991 à 2005 : 288 maisons et 786 appartements
De 2005 à 2011 : 81 maisons et 476 appartements
Voilà pour les faits, qu’il était
bon de rétablir. Ce n’est pourtant pas l’essentiel.
Dans son propos Monsieur Champion
parle de « cités enclavées, sans adressage, QUI FAISAIENT PEUR » !
Quel mépris, quelle indécence ! Ce morceau
d’histoire de notre ville devrait nous inciter à traiter avec objectivité et
rigueur le parcours de ces femmes et de ces hommes, comme Gervaise Gallèpe,
Pierre Kérautret, Gérard Machelart, Albert Giry, Georges Blache et André
Léonet, qui dans les conditions de leur époque ont contribué à faire de notre
ville ce qu’elle est devenue aujourd’hui. Au lendemain de la libération, tout
était à refaire. La tâche était immense.
Ce qui marque cette période de
l’après-guerre, c’est l’état dans lequel se trouvait l’habitat. Des maisons
avaient été édifiées un peu partout. La plupart en matériaux légers, sans eau,
sans gaz, sans électricité, sans assainissement. La première des obligations
était donc de sortir ces milliers de familles de ces infâmes taudis. C’est
grâce aux élu-e-s de cette époque que des milliers d’enfants, de jeunes, de
femmes et d’hommes ont pu retrouver le « droit de vivre ». Il fallait
voir la joie éclairant les visages de ces familles, quittant leur taudis, leurs
baraques sans eau, sans sanitaire pour rejoindre leur « Palace ».
C’EST ICI QUE L’HISTORIEN DOIT ÊTRE CAPABLE DE RETRANSCRIRE LE PLUS FIDÈLEMENT
POSSIBLE L’HISTOIRE D’UNE ÉPOQUE SANS ÉMETTRE DE JUGEMENT OU LIRE LES FAITS
AVEC LE FILTRE D’UN ESPRIT MODERNE : LES VALEURS D’AUJOURD’HUI NE SONT
PLUS LES MÊMES QUE CELLES D’AUTREFOIS.
Nous notons toutefois que monsieur
Champion, si prompt à condamner les tours s’empresse, avec ses ami-e-s de la
majorité municipale, de garder celles se situant à Cachin, comme à Gagarine,
dans le cadre de la rénovation urbaine. Et d’en construire une autre de 11
étages, en bordure de l’autoroute. Mais que nous sommes bête !, ce n’est
pas une tour, c’est « UN SIGNAL ». Il y aurait encore beaucoup à
dire, sur le pensum du 18 décembre. Nous nous en tiendrons donc à quelques
brèves remarques.
- Nous nous félicitons que grâce à l’action déterminée des citoyens et des initiatives d’associations telles que l’ASVR, on en soit enfin arrivé à admettre comme indispensable la protection l du patrimoine architectural. Mais quel temps perdu !
- · Nous ne savons pas ce que les historiens retiendront du 4ème cycle que monsieur Champion appelle « le tournant ». En tout état de cause, il restera celui des records en matière de modifications du Plan Local de L’Urbanisme. Il est celui d’une période où les promoteurs immobiliers ont imposé leur loi. Celui d’une cession sans précédent, de biens communaux à ces mêmes promoteurs, dans des conditions assez avantageuses, parfois, si l’on en croit le rapport produit par la cour des comptes récemment.
- · Enfin, s’il est une leçon à tirer de ce 18 décembre, succédant à bien d’autres prestations du même acabit, c’est qu’il faut savoir, hier, comme aujourd’hui, faire preuve de modestie, d’humilité et de retenue. Il semble que ce soit beaucoup demander à Monsieur l’Adjoint au Maire, chargé de l’aménagement et du patrimoine.
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