« LE COUP DE PISTOLET DU CONSEIL D’ÉTAT », L’ÉDITORIAL DE PATRICK LE HYARIC DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR !
Le Conseil d’État, qui n’est pas réputé pour être une officine révolutionnaire, vient de tirer un bruyant coup de pistolet au milieu du mauvais concert gouvernemental chargé de faire accepter la destruction des retraites solidaires. En principe, une étude d’impact est destinée à préparer une loi. Or, le gouvernement a transmis à la haute juridiction, en contournant les principes de fonctionnement constitutionnel, deux textes de loi – l’une organique, l’autre ordinaire – six fois modifiés depuis début janvier, puis une étude d’impact de mille pages. Une longueur qui dit exactement l’ampleur de l’embrouille pour empêcher de réfléchir véritablement aux conséquences d’une telle transformation régressive. On est ici proche de la négation de « l’État de droit ».
La plus sévère critique porte sur
un mensonge : la qualification du nouveau système de retraite « universel ». En
émettant de puissantes réserves sur une application des lois avec vingt-neuf
ordonnances – y compris « pour la définition d’éléments structurants du nouveau
système de retraite » –, le Conseil d’État confirme en creux la stratégie de
camouflage des effets négatifs du projet, parmi lesquels le doute soulevé sur
les moyens de financement et le recul de l’âge ouvrant droit à une retraite
complète à 65 ans, puis 67 ans, des promesses inconstitutionnelles, et l’acte
antidémocratique que constitue le recours aux ordonnances. Même le prétendu
compromis sur « l’âge pivot », brandi par le gouvernement et ses VRP
audiovisuels, est étrillé par la juridiction administrative. Ajoutons cette
incroyable et inédite caractéristique : la représentation nationale devrait
voter un texte avec des « blancs », où les moyens de l’équilibre financier ne
seraient connus qu’à la fin du mois d’avril, au terme de la conférence sur le
financement. Bref, un chèque en blanc.
L’avis de la juridiction
administrative conforte le front syndical en action et les 61 % de nos
concitoyens qui demandent le retrait de ces lois. Le pouvoir et la
représentation parlementaire sont désormais face à des questions politiques et
juridiques de haute portée : la conférence des présidents de l’Assemblée
nationale est fondée à demander à ne pas débattre de ces projets. En relais du
mouvement protéiforme qui se déploie, les groupes parlementaires progressistes
chercheront à déposer une motion de censure ou, comme le suggère André
Chassaigne, une motion référendaire ouvrant la voie à une consultation
populaire. Une situation nouvelle est créée. La démocratie doit parler !
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire