« TEMPS PERDU », L’ÉDITORIAL DE PATRICK APEL-MULLER DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR !
Les défilés syndicaux d’hier – plus puissants que le prédisaient les
oracles gouvernementaux – témoignent d’une évolution qui devrait alerter
l’Élysée. Les métiers et les revendications convergent plus qu’ils ne
voisinent.
La rumeur s’avère un symptôme inquiétant. La majorité bruisse de fausses
informations. Le remaniement est d’abord imminent, son scénario est écrit, puis
il est repoussé, il sera ample à 9 heures et plus limité à 15 heures, Édouard
Philippe va présenter sa démission et être renommé dans la foulée… Les
pressentis jouent la modestie, les autres attendent leur tour, riches des
espérances suscitées par des démissions en cascade. L’horloge du maître indique
une heure et en sonne une autre… Le feuilleton du pouvoir personnel tourne à
l’indécision persistante.
Comment de nouvelles têtes pourraient-elles convaincre quand le cap ne
change pas ? L’impopularité du pouvoir ne tient pas tant à l’arrogance d’un
président, à une « pédagogie » insuffisante, comme le murmurent les cadres de
la start-up nation, qu’à la prise de conscience rapide des vrais ressorts du
macronisme. La proclamation de la jeunesse cachait les vieilles recettes
libérales ; la modernité masquait une brutalité contre les milieux modestes ;
le nouveau monde dissimulait les techniques les plus autoritaires de l’ancien ;
les prêches sur l’émancipation préparaient des précarités généralisées et la
culpabilisation de ceux qui ne trônent pas parmi les très riches. Il ne suffira
pas de colmater les brèches autour de la table du Conseil des ministres pour
renverser l’opinion des Français.
Un signe le confirme. Les défilés syndicaux d’hier – plus puissants que le
prédisaient les oracles gouvernementaux – témoignent d’une évolution qui
devrait alerter l’Élysée. Les métiers et les revendications convergent plus
qu’ils ne voisinent. L’appréciation sur le sens des choix du pouvoir est plus
globale, reliant le particulier des difficultés aux orientations générales. Des
retraités aux hospitaliers, des étudiants aux cheminots, la régression
macronienne s’évalue progressivement comme un même mouvement. Cette faille ne
sera pas comblée par le remaniement qui ne manquera pas d’advenir. Sans
susciter d’espoir.
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