UNE AIDE POUR UN LIBRE DÉVELOPPEMENT, L’ÉDITORIAL DE PIERRE CHAILLAN DANS L’HUMANITÉ DU MERCREDI 8 AOÛT
L'éditorial de Pierre
Chaillan. L'aide publique au développement va-t-elle normaliser des pratiques
néocoloniales du temps pas si lointain de la Françafrique ?
L’aide au développement va-t-elle normaliser des pratiques néocoloniales du
temps pas si lointain de la Françafrique ? Ou comment l’annulation de la dette
va-t-elle au final être détournée par un système pervers de financiarisation
vers une résurgence de dettes tous azimuts. À l’instar de la Côte d’Ivoire,
c’est ce qui se passe avec l’essor des contrats de désendettement et de
développement (C2D), formes de prêts venant en substitution d’une annulation
pure et simple de la dette ou de l’octroi de dons. Cette aide publique au
développement dont la France (qui se targue de sa forte augmentation !) est le
chantre à l’échelle mondiale oriente les projets vers des investissements
juteux en faveur des groupes privés des pays prêteurs...
Plutôt que de répondre aux besoins sociaux et de permettre aux peuples de
disposer de leurs biens communs et de leurs choix politiques et économiques,
cette nouvelle doctrine de développement financiarisé dégage une manne
accaparée à nouveau par les créanciers dominants et capitalistes et aliène les
peuples de leur souveraineté et de leur libre indépendance. Sans participation
des peuples eux-mêmes et de la « société civile », les subventions publiques à
des États en difficulté se transforment en des cadeaux versés aux grandes
entreprises et venant renforcer les régimes autoritaires. Depuis les années
2000, sous la pression des citoyens, des organisations politiques et
syndicales, des associations et des mouvements altermondialistes, l’exigence de
l’annulation de la dette a dû être entendue. Elle s’inscrivait dans un monde de
coopération et de co-développement où les intéressés eux-mêmes sont acteurs de
leur propre développement.
Figure de cette lutte
émancipatrice, Thomas Sankara, le président burkinabé assassiné, avait
admirablement décrit le « développement endogène » par ces mots : « Le plus
important, je crois, c’est d’avoir amené le peuple à avoir confiance en
lui-même, à comprendre que, finalement, il peut s’asseoir et écrire son
développement, il peut s’asseoir et écrire son bonheur. »
Soyez le premier à commenter !
Enregistrer un commentaire