« Feu de tout bois », l’éditorial de Patrick Apel-Muller dans l’Humanité de ce jour !
Les futaies
et les halliers n’abritent pas que la liberté. Ils peuvent se muer en théâtre
discret d’une exploitation sordide. Des travailleurs marocains dans l’Indre y
ont vécu un véritable esclavage moderne, sous-payés, mal-logés, mal-soignés
quand des blessures graves vont jusqu’à l’amputation. Cette histoire que relate
aujourd’hui l’Humanité en croies bien d’autres dans ces forêts où œuvrent discrètement et au noir des bûcherons venus
aussi de l’est de l’Europe, dans des vignobles cossus, des vergers d’abondance,
des chantiers brûlants sous la canicule. Cette exploitation sous la menace et
la contrainte de la misère se déroule jusqu’au cœur de la capitale. Parfois derrière
des vitrines flatteuses. Sans les solidarités qui permettent que justice soit
faite et que les victimes, souvent immigrées, ne subissent pas la double peine
d’une expulsion, le scandale se poursuit à bas bruit.
Le cas
de ces quatre bûcherons marocains paraît une caricature. Ne disait-on pas la
même chose du sort des 16 coiffeuses du 57, boulevard de Strasbourg à Paris,
payées moins de 40% du Smic, menacées par leur patron, travaillant dans des
conditions indignes et dangereuses pour la santé ? Un tribunal leur a
donné raison, mettant en lumière une « traite des êtres humains »
dans le cadre d’un travail collectif.
Ce n’est
pas en Mauritanie mais en France que ces indignités ont cours. Comment est-ce
possible ? Les inspecteurs du travail sont trop peu nombreux et parfois
entravés par des administrations qui ne veulent surtout pas de vagues. L’affaiblissement
du droit social ouvre des failles, le goût de nos gouvernants pour l’ubérisation
a étendu le domaine du travail sans droits et le système favorise une course
effrénée au profit. Nos libéraux prétendent qu’ainsi l’entreprise est plus
libre…Enfin, la fragilité des travailleurs sans papiers les expose à tous les
chantages et aux emplois dissimulés. Au-delà de l’indignation, il faudra des
combats de tous les jours pour éradiquer ce qui permet de flétrir ainsi l’humanité.
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