" La langue coupée ", l'éditorial de Sébastien Crépel dans l'Humanité de ce jour !
La crise qui a éclaté entre
Emmanuel Macron et son chef d’état-major en cache une autre. Celle, plus
globale, que provoque le rapport de plus en plus problématique du président de
la République avec les autres institutions du pays, fat d’autoritarisme et de
brutalité. Le militaire parle avec sincérité aux députés ? Il doit être
remplacé sur le champ par un autre à la langue coupée. C’est, en substance, le
message que le chef de l’État fait passer. Nul doute que le successeur du démissionnaire
se tiendra comme la Grande Muette devant la représentation nationale.
Le général de Villiers est le
fusible qu’Emmanuel Macron fait sauter pour court-circuiter le Parlement, déjà
rudement maltraité par la méthode des ordonnances sur le Code du travail. Ses élus
se trouvent directement atteints dans leur fonction de contrôle de la politique
de défense et d’élaboration du budget de la nation, et déconsidérés de manière
inédite par un président de la République qui assimile leur travail à de « l’étalage
de débats sur la place publique ». Il se trouve malheureusement peu de
forces politiques pour soulever le problème. « Si la parole des militaires
n’est plus totalement libre devant les représentants de la nation, auxquels ils
ont des comptes à rendre, cela signifie que notre pays, la République, est aux
portes d’un changement de régime qui tourne le dos aux principes démocratiques
qui sont les siens », alertent les communistes.
La question posée dépasse celle
du bien-fondé ou non des positions qui ont coûté son poste au chef d’état-major.
Elle est de savoir si le Parlement peut encore exercer ses prérogatives sur des
choix aussi graves que celui de la guerre ou de la paix, de la poursuite ou non
d’opérations extérieures aussi ruineuses budgétairement que dangereuses et
contre-productives politiquement, de la part belle faite à la dissuasion
nucléaire à l’inverse des exigences internationales de désarmement ou de la participation
de la France à une organisation sous domination états-unienne comme l’OTAN. Quand
il va de la sécurité collective, il ne peut être question de « domaine
réservé » du président de la République.
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