" La boursicoteuse ", l'éditorial de Jean- Emmanuel Ducoin dans l'Humanité de ce jour !
C’est vieux comme le capitalisme :
les spéculateurs aiment l’exploitation. L’exploitation des salarié(e)s. Depuis
l’industrialisation de notre vieille Europe, les noms des maîtres œuvrant pour l’universelle
vindicte patronale ne manquent pas. Ils s’accumulent sur une longue liste
noire. Ce sont des noms de coupables, qui agissent souvent sans bruit mais qui,
comme des machines, dans leur engrenage, dans leurs laminoirs, prennent les
femmes et les hommes criant, tandis qu’eux, c’est en silence qu’ils les
broient. Un nom vient de s’ajouter à cette triste liste. Celui de Muriel
Pénicaud.
Les révélations que nous publions
risquent de secouer la ministre du travail. Non pour d’éventuelles raisons
judiciaires, puisque les faits sont « légaux », nous rétorquera-t-on.
Mais bien pour des raisons politiques. Et morales. Voyez-vous, avant d’être
nommée par Macron au gouvernement, Mme Pénicaud était directrice
générale des ressources humaines chez Danone. Beaucoup louent d’ailleurs son
passage chez le leader mondial des produits laitiers. Comment réagiront-ils à
la lecture de l’Humanité ? Car, selon les comptes officiels de l’entreprise
pour l’année 2013, que nous avons consultés, Mme Pénicaud a réalisé
plus d’un million d’euros de plus – values boursières, par un simple jeu d’écritures,
en une seule journée ! Et pas dans n’importe quelles circonstances. Quand croyez-vous
qu’elle décida de revendre une partie de son paquet de stock- options de chez
Danone ? Le 30 avril 2013, jour où elle exploita une spectaculaire
remontée de l’action…juste après l’annonce de 900 suppressions d’emplois. Les restructurations,
çà plaît à la Bourse et çà rapporte aux puissants. Résultat de ce coup digne
des maîtres des forges : un profit immédiat de 1,1 million d’euros !
Souvent, la responsabilité
meurtrière des financiers se dérobe, s’évanouit dans une sorte d’obscurité. La voici
en pleine lumière. L’ex –boursicoteuse peut-elle « moralement » conduire la
casse du Code du travail, l’aménagement du CDI version Medef, la dérégulation
du CDD, et. ? Osera-t-elle affirmer que faciliter les licenciements s’avérera
bénéfique pour à l’emploi, donc aux salarié(e)s ? En somme, Muriel
Pénicaud est –elle encore digne du titre de ministre « du Travail » ?
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