" Agonie ", l'éditorial de Paule Masson dans l'Humanité de ce jour !
Le Salon de l’agriculture va,
cette année, encore baissé le rideau sur une scène un peu plus dévastée par les
impasses du productivisme agricole. Dimanche, les micros seront coupés, le
ballet des présidentiables terminé. « Des prix, pas de primes ! »
ont hurlé les agriculteurs sur les pas des politiques qui ont défilé, inquiets,
une fois de plus, de n’être pas écoutés.
Les producteurs sont devenus les
condamnés d’une Politique agricole commune qui aide le capital plutôt que le
travail. En les jetant dans la fosse aux lions de la concurrence mondiale, l’Union
européenne et la France, reconnue comme le moteur de l’agrobusiness européen,
ont développé un réflexe protectionniste tenace. Le Front national flatte ce
rejet de l’Europe mais propose d’instaurer une « version France » de
la PAC. Or, le problème ce n’est pas la frontière mais le système.
La colère contre une politique
qui a transformé les agriculteurs en machines à produire à bas coûts devrait
cogner dans la conscience de ceux qui font de la « baisse du coût du
travail » l’alpha et l’oméga du retour de la croissance. Les paysans ne
connaissent que trop bien le prix humain de ce conseil libéral. Travailleurs
indépendants, ils subissent l’injonction de s’appauvrir depuis plus de vingt
ans. Aujourd’hui, un sur trois gagne moins de 350 euros par mois. Le système
est à l’agonie.
Tout est à revoir. L’agrobusiness
enferme les paysans dans le surendettement, les accule au suicide (700, l’an
dernier), pollue le sol et l’eau, contribue au réchauffement de la planète,
affecte la santé, nourrit mal la population. Pour retisser les fils d’une
agriculture durable, familiale, vivrière, pauvre en intrants et riche
nutriments, pourvoyeuse d’emplois et de sens, mieux vaut porter le regard loin
sur la gauche. Sur le terrain des alternatives à l’agriculture intensive, il y
a beaucoup d’ententes possibles.
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