« S’ORGANISER », L’EDITORIAL DE MAURICE ULRICH DANS L’HUMANITÉ DE DEMAIN MERCREDI 19 SEPTEMBRE
L'éditorial de Maurice
Ulrich. Au-delà du détail des mesures annoncées, Emmanuel Macron a
lui-même défini la philosophie, si l’on peut dire, en tout cas le cadre de sa
réforme des offres de soins pour « les cinquante années à venir ».
La perspective est pour le moins audacieuse au regard de la réalité et de
cette « analyse » à la va-comme-je-te-pousse du président : « Notre système de
santé ne souffre pas d’un problème de sous-financement, il pèche par un vrai
handicap d’organisation. » C’est faire bon marché du cruel manque de moyens, de
personnels et de modernisation des équipements dont ont témoigné, depuis des
mois, les luttes multiples des salariés ou des médecins dans les hôpitaux, les
maisons de retraite. C’est ne pas entendre la vérité des paroles de celles et ceux
qui sont, tous les jours, confrontés à la souffrance, à la dépendance, à la
mort.
Avec Emmanuel Macron, c’est tellement facile. Pour se payer un costard, il
n’y a qu’à travailler, et pour trouver du boulot, il faut juste traverser la
rue. Pour régler dans les cinquante ans à venir les questions de la santé, il
faut juste s’organiser autrement. Les hommes et les femmes qui tentent
précisément de s’organiser pour faire face, avec parfois, comme le soulignait
une infirmière à la Fête de l’Huma, « la honte, voire la culpabilité de devenir
les agents, contre leur gré et leur vocation, d’une vraie maltraitance »,
apprécieront.
Il n’y a pas si longtemps, des dames de la bonne société animées par un pur
esprit de charité allaient expliquer aux femmes des milieux populaires comment
bien gérer leur budget, s’occuper de leurs enfants et faire de la bonne cuisine
avec trois quignons de pain. S’organiser. Il y a de ça chez Emmanuel Macron,
sauf que ce n’est pas par esprit de charité. C’est une vision du monde. Il y a ceux
qui réussissent et ceux qui ne sont rien, coûtent un pognon de dingue et qui
doivent, s’ils veulent s’en sortir, faire comme le baron de Münchhausen se
tirant lui-même par les cheveux. Sans doute trouvera-t-on çà et là, à la
condition d’oublier les tours de bonneteau sur les chiffres, quelques mesures
adaptées, mais rien qui puisse définir le système de soins du XXIe siècle.
Maurice Ulrich
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